(libre) la nuit est chaude, elle est sauvage - défi

Une grande envie de changement se fait sentir. Je crois qu’à force de sortir tous les soirs, j’ai fait la connaissance de tous les barmans de la ville. Je me lasse vite, trop vite. Alors je cherche un endroit où aller passer ma soirée, un endroit où je n’ai encore jamais mis les pieds. Sur le papier, ça ne semble pas compliqué à trouver. En réalité, c’est plus difficile que ce que je pensais. Alors je prends le temps d’une douche pour réfléchir. Et vient le moment où ça sonne comme une révélation dans ma tête. Je n’ai pas mis les pieds dans une boîte de nuit depuis… Depuis longtemps ! J’ai toujours préféré les barres. Peut être parce que je suis un piètre danseur. Qu’importe. Je sors pour m’amuser de toute façon.

J’attrape les clés posées sur la table et je sors, tranquillement. Je vais marcher et, quand j’en aurais marre, j’appellerais un taxi. Il faut penser un peu à la planète, et marcher n’a jamais tué personne. Certes, le retour sera plus compliqué. A moins que je reste sage et que je ne boive que de l’eau, mais il faut être lucide. Une bonne demi-heure. C’est le temps qu’il m’a fallu de mon appartement à cette boîte de nuit. Et je marche vite. Et je ne me suis pas perdu. Et c’est tout !

Ni une, ni deux, je vais directement vers le comptoir prendre un bon petit verre de vodka, histoire d’entamer cette soirée –ou plutôt cette nuit– comme il se doit. Un verre, puis un deuxième avant que je me décide à aller sur la piste. Je ne suis pas encore en quête de la fille que je vais mettre de mon lit ce soir quand une belle blonde vient se frotter à moi. Après quelques pas de danse, je lui propose de sortir fumer. Un beau prétexte, puisque je n’ai jamais fumé de ma vie. Mais j’ai encore mon verre, alors je profite de l’air frais pour remplir mon corps d’un peu plus d’alcool. Je la regarde, un sourire sur le visage. Elle m’embrasse. Elle s’excuse. Elle m’embrasse. C’est agréable, une fille qui prend autant les devants. « Je ne voudrais pas que tu ais des regrets. » Je ne vais pas mentir, elle embrasse plutôt bien.  

Elle m’intrigue. Elle semble rongée de l’intérieur. Si je peux lui faire oublier l’accumulation de regrets qu’est sa vie, je suis partant. Tout le monde mérite d’être heureux, ou presque. Je ne veux pas m’égarer. Mais elle, si inoffensive, elle mérite le bonheur. Ce n’est pas moi qui lui donnerais. Enfin je peux quand même essayer de lui faire oublier, l’espace d’une soirée. Je la regarde. Je l’écoute. J’ai des défauts, mais je sais écouter les gens. Bon, je ne suis pas psychologue non plus, donc il ne faut pas abuser.

Quand elle sort une cigarette de son paquet, je tourne la tête. Je n’aime pas l’odeur de la clope. Comme d’habitude, je vais prendre sur moi et je lui proposerai un bonbon à la menthe quand elle aura fini de se pourrir les poumons. Moi, je pense que la vie est trop belle pour que je puisse laisser c’te merde bouffer mon corps. Je veux pouvoir courir encore à quatre-vingts ans, avoir des poumons en pleine santé et surtout, garder de belles dents blanches. C’est peu commun comme philosophie. Bon, je ne pense ça que pour la clope et tout ce qui s’y rapproche. L’alcool par contre, je ne m’en prive pas. Je finirais peut être ivre mort. Ce serait une mort con quand même. Sans me vanté, je tiens bien l’alcool, alors j’espère plutôt mourir d’un crash d’avion.

Je ne peux m’empêcher de rire. Il me faut bien une petite minute pour me reprendre. Je ne sais pas, ça doit être ce mot « petite copine » qui me fait rire. Une fois que j’arrive à reprendre ne serait-ce qu’un peu de sérieux, je plonge mes yeux dans les siens, en souriant. « Je n’ai jamais de regrets. Et je n’ai jamais de petite copine. Par contre, embrasser une belle inconnue, ce n’est pas rare. » Elle pourrait fuir en courant. Je suis franc. Parfois trop. En même temps, on n’est pas dans un club de lecture. « Je vais te cherche un verre ? »

Je lui souris. « Tu fais ce que tu veux, tu n’as pas de compte à me rendre. On ne se connait même pas de toute façon. » Je pense que je suis le dernier homme sur terre pour faire des leçons de morale à quelqu’un. Certes, je ne fume pas, mais je suis indiscipliné, fêtard, coureur de jupons. Dis comme ça, j’ai tous les défauts de la terre. Mais en fait, quand on y repense, je suis juste un hyperactif tolérant et respectueux.

Je la vois sourire, après mes paroles. Est-ce qu’elle sourit parce que je suis libre comme l’air ? Est-ce qu’elle sourit pour le compliment ? Je ne sais pas. Mais elle a un très beau sourire en tous cas. Et puis, il faut être honnête et revenir à la réalité de cette soirée. Si je la fais sourire, j’ai plus de chances de la mettre dans mon lit. C’est vrai ça, je ne suis pas venu en boîte pour danser, loin de là. J’ai besoin d’une femme. Une femme que je ne reverrais peut être jamais. Ou alors une femme qui s’avère être un très bon coup que je ne peux pas laisser filer. Cette fille, elle m’intrigue. Celle que j’ai face à moi ne semble pas être en accord avec elle-même. Pas à 100% du moins. J’ai envie de savoir. Je veux vérifier mes doutes. Enfin non, les confirmer parce que je ne me trompe jamais. Bizarrement, c’est l’un des premiers trucs qu’on nous apprend à l’armée : savoir analyser, tant les personnes que l’environnement.

Je m’éclipse quelques minutes. Le temps de me récupérer une vodka, et de lui prendre un mojito. Je reviens, le sourire aux lèvres. Je la vois adossée à un mur, regardant le ciel. « Un mojito pour la demoiselle ! » Je lui tends son verre, avant de commencer à boire dans le mien. La vodka, rient de mieux. « Tu cherches la Grande Ours ? » Je lui demande en riant.

J’ai beau connaître le ciel, je dois reconnaître –intérieurement- que ça connaissance en astronomie m’épate. Les étoiles, je trouve ça mignon, sympa à regarder cinq minutes mais je me lasse vite. Par contre, quand il s’agit de regarder un avion voler pendant des heures là, je suis présent. Et en plus de ça, elle sait prédire la météo. « Tu aurais pu me dire que tu es miss météo ! » La petite musique de la vanne pourrie retentit dans ma tête. Certes, ce n’était pas très drôle, mais ça détend l’ambiance au moins.

Je lui souris. « Tu tiens mieux l’alcool ou tu bois moins ? » J’avoue que ça m’arrangerait que ce soit la deuxième hypothèse. Quand je suis ivre, j’aime que les femmes en face soient au moins au même stade. Mais comme je tiens plutôt bien l’alcool, j’ai souvent une longueur d’avance. Là, par exemple, j’ai bu plusieurs verres et je n’ai aucun problème. Je suis un peu plus joyeux que d’habitude c’est tout. De base, je suis sociable et souriant de toute façon. Certes, l’alcool amplifie, mais pas tellement sur moi. Par contre, quand je suis vraiment ivre, je peux être con, très con. Je crois que j’ai déjà frôlé la mort plusieurs fois d’ailleurs. Mais c’est ça qui est cool ! Je préfère quand je me rappelle de tout le lendemain quand même, c’est encore plus drôle. « T’as pas choisi le bon pigeon ma jolie. Je bois, je ne conduis pas. » Je la regarde, tout en buvant. Je m’approche d’elle, et pose ma main dans son cou. « Je peux t’emmener chez moi par contre. » Je pose un baiser dans son cou, avant de me reculer. « De toute façon, tu as le choix entre ça, abîmer tes petits pieds ou payer un taxi une blinde. » Le regard espiègle. Le sourire charmeur. Je ne la quitte pas du regard. « Je serais toi, je me choisirais. » Je ris. Il y a des jours où j’ai l’impression de draguer comme un adolescent de quatorze ans, la honte ! Mais j’ai plus de charme. Plus d’expérience aussi, et ça aide bien. Je ne suis pas un monstre non plus. Moi, je suis juste un de ces mecs qui ne comprend pourquoi l’égalité entre les hommes et les femmes n’est toujours pas acquise dans notre société. Eh ouais, je suis un bon gars –pour ça du moins. Je finis mon verre. « Je vais chercher un autre verre. Je serais au bar. » Je tourne les talons pour rentrer vers la boîte. « Et je ne suis pas du genre patient. » Trop de gentillesse en peu de temps, ça ne me réussit pas vraiment en fait.