Eleonoora + Il y a tellement longtemps que je t'attends

Un regard à gauche, à droite, le bruit de la serrure se fait discret. Cela fait bien longtemps qu'il ne panique plus à l'idée de se faire prendre, il a pris de l'assurance durant toutes ces années, il ne retient même plus sa respiration. Mais ça ne l'empêche pas pour autant d'être prudent. Il sait que de n'avoir plus peur fait disparaître la tension, ce stress qui permet de rester vivant en prenant des décisions parfois irrationnelles pour sauver sa peau. Il ouvre la porte, son parfum s'engouffre dans ses narines. Il regarde autour de lui comme s'il n'avait jamais vu cet endroit. Il prend l'escalier pour aller à l'étage, il connaît le chemin par cœur, il y est venu tellement de fois depuis qu'il est à Biarritz. Pourtant il ne lui a jamais parlé. Sa chambre est rangée parfaitement, comme à chaque fois qu'il vient. Il sait que si l'on veut voir l'état psychologique d'une personne, il suffit de voir dans quel état se trouve la chambre à coucher. La sienne ne ressemble plus à rien au fil des nuits... Il se dirige vers la table de chevet et prend ce cadre ou l'on voit une jeune femme souriante, un petit homme qui lui a visiblement sauté sur le dos. Il caresse du pouce le visage de cette femme, sort la photo du cadre et déchire la partie ou l'on voit le bambin avant de retirer ses chaussures et de s'allonger dans les draps à l'odeur de lessive, et reste là, couché à la contempler pendant de longues minutes.

Il se lève en prenant soin de remettre les draps à l'identique, puis four le cadre et la photo dans son sac à dos. Il passe devant cette commode, réfléchi quelques secondes et se décide à l'ouvrir. Tout ce tas de dentelles, de ficelles. Il ne sait que choisir mais pose son dévolu sur celle-ci, une couleur prune, profonde. Il l'apporte à son visage, hume le dessous à plein poumons puis frotte le tissu délicat de sa joue. Cette fois, il décide de l'emporter avec lui, l'enfonce dans la poche de son jean.

La décision était prise, demain ils se retrouveraient enfin.

Assit sur un banc il regarde les gens passer devant lui, les bambins jouer au ballon, les adolescents roucouler sur l'herbe fraîche. Un bouquin à la main, il l'attend. Il sait que ce jour là, elle aime venir au parc avec son petit ange.

Enfin la voilà, rayonnante comme d'habitude, son sourire et ses joues prenant pratiquement toute la place sur son visage, elle à l'air heureuse, pleine de vie. Son fils court vers d'autres petits. Ses amis ? Le joli bout de femme s'assoit sur un banc, elle aussi un bouquin à la main, mais comme d'habitude elle préférera être absorbée par la vu de son enfant. Il n'avait qu'à venir lui parler, un sujet bateau : Le titre de son livre ? Mais le destin en décida autrement, le ballon du gamin vient rouler jusqu'à ses pieds. Louis jette un coup d'oeil discret à Eleonoora, elle lit. Alors il profite de ce qu'on lui offre, attrape le ballon et se dirige vers le petit. Il lui tend, le petit sourit, le même sourire que celui de sa douce mère. Il s'accroupit pour être à sa hauteur. "Salut bonhomme, moi c'est Louis ! Il est beau ton ballon dis voir, il est à toi ?" Il hoche la tête, le sourire jusqu'aux oreilles. "C'est ma maman qui me l'a acheté" " Elle est vraiment gentille ta maman !" "Mh !" Répond le petit homme en acquiesçant. Du haut de ses trois ans, il lui demande les yeux brillants d'espoir. "Tu veux jouer avec moi dis !?" Louis ne pouvait demander mieux. "Avec plaisir !" Ils débutèrent leur petit jeu de passe, Louis faisant mine de perdre de nombreuse fois afin de ne pas vexer ce tout petit garçon, incapable de rattraper ce ballon plus gros que lui.