la fin du voyage (Eneko)

les belles paroles ne suffisent plus. la patience non plus ne suffit plus. tu as beau retourner le problème dans tous les sens, tu sais que tu ne peux rien y faire, tu sais que c'est fini. ça te fait mal, ça te déchire en deux. tu sens ton coeur qui s'émiette au fur et à mesure que tu écris cette lettre. tu sais que tu ne peux pas lui parler, pas en face à face, tu sais que tu craquerais de nouveau. tu le sais bien tout ça, tu le sais que trop bien. s'il se présente à toi, s'il te fait face, tu sais que tu seras faible et que tu ne pourras pas continuer ta démarche. la fin du voyage. c'est ça. le rêve est terminé, il faut maintenant que tu retournes à la réalité. tu écris ta lettre. tu la déchires. tu recommences. et ainsi de suite. ça doit faire deux bonnes heures que tu essaies d'écrire, de mettre des mots sur ce que tu ressens mais à ce stade il n'y a pas de mot, non il n'y a plus de mot. tu perds l'homme de ta vie, l'homme de tes nuits, tu perds ton âme soeur et tu ne sais pas si tu t'en remettras. tu vas essayer, tu vas tout faire pour mais pour le moment tout ce que tu peux faire c'est verser quelques larmes qui viennent tâcher ta lettre. « Eneko, mon ange. Je ne peux pas te dire tout ça, je ne peux pas te parler parce que je sais que je ne tiendrai pas. je sais que je m'effondrerai, je sais que je ne serai jamais assez forte alors je préfère t'écrire. je te présente mes excuses, j'espère que tu me pardonneras un jour pour tout ce que j'ai détruit, je m'en veux mais ça ne suffit plus, j'ai cassé quelque chose entre nous. j'ai cassé ce qui faisait que nous étions un nous. nous ne le sommes plus non, nous ne sommes plus que deux âmes qui se perdent au lieu de se retrouver. je m'en vais Eneko. je te libère en quelques sortes de tout ce mal qui t'habite. tu n'es plus le Eneko que je connaissais, tu n'es plus celui que j'ai connu comme je ne suis plus celle que tu as connu. on a essayé, on a tout fait, on a tout essayé mais la fin est bien là. j'aimerai t'écrire que c'est faux, qu'il y a encore de l'espoir mais tu l'as dit toi-même, ça ne serait que repousser encore et encore. alors, arrêtons de repousser maintenant. tu seras toujours l'homme de ma vie, et je serais toujours là si tu as besoin de quoique ce soit. quoique tu puisses penser, tu m'as rendu heureuse, tu as rendu ma vie un peu plus belle chaque jour. surtout, prends soin de toi, s'il te plaît, prends soin de toi et continues d'avancer. ne reste pas dans ton coin, ne te renferme pas. vis. simplement. mais continue de vivre. » tu relis. une fois, deux fois. les larmes s'empressent d'arriver, tu finis par plier cette lettre avant de signer. tu dessine une douce lune et tu laisses la lettre là, sur l'îlot central pile au moment où tu entends la porte d'entrée. tu le laisser arriver, sagement, jusqu'à t'a hauteur. « je .. j'ai quelque chose pour toi. » que tu lui souffles simplement. tu retiens tes larmes, tu retiens tes peurs. la fin du voyage. encore et encore. tu lui tends la lettre, il va pour l'ouvrir et tu l'arrêtes. « non, tu la liras quand je ne serais plus là. s'il te plaît. » son regard dévie, il doit maintenant voir ta valise, une valise plutôt imposante qui est là et qui t'attend. où tu vas aller ? tu n'en sais rien encore. « ça devait arriver, à un moment donné. » que tu lui souffles simplement. tu t'approches, tu caresses tendrement sa joue avant de te reculer. la fin. tu respires un bon cou avant d'aller chercher ton manteau et l'enfiler. tu reviens vers ta valise, tu la prends, la soulèves, prête à t'en aller.

Une lettre, pliée en quatre. Eneko l’observe, les sourcils froncés, avec la curiosité qui le pique au vif. Il ne sait pas ce qu’il y a dedans, mais il sent à travers quelques taches visibles, qu’il y a eu quelques larmes qui ont atterri dessus. Ses doigts se crispent sur le papier : il n’a pas le droit de lire, pas tout de suite. Eneko s’interroge, puis est attiré par une chose. Une valise non loin d’eux. Ce n’est pas un sac, ni une petite boîte, c’est une grande valise qui doit contenir toute sa vie, à elle. Il comprend, a le cœur qui se resserre, un peu plus lorsqu’il sent sa main sur sa joue. En silence, il ferme les yeux, profite au maximum de cette caresse si courte, cette caresse qui ressemble à un geste d’au revoir, d’adieu. Figé, sentant ses yeux s’humidifier, sa gorge se nouer, il n’arrive pas à parler, ne réalise pas vraiment ce qui se passe non plus, avant de la voir enfiler son manteau, de la voir prendre sa valise dans la main. « Mao. » souffle-t-il, finalement, en posant la lettre sur la table basse, puis en se rapprochant d’elle. Il pose sa main sur la valise, la force à la reposer par terre et place une main sur sa taille, la rapproche aussitôt de lui, l’encercle de ses bras. Il enfouit son visage au creux de son cou, resserre ses doigts sur son dos, respire son odeur. C’est la fin, il le sait lui aussi, mais ça lui fait mal de l’admettre, de l’assumer. Eneko, il a aimé Maona tellement fort, avec tellement d’intensité que la laisser partir, être témoin de leur histoire qui se termine, ça fait mal. Il sait pourtant qu’elle a raison, que ça devait arriver, qu’ils n’ont fait que repousser les choses, qu’essayer de passer au-dessus des points négatifs pour mieux se retrouver, sans y arriver. Il reste dans cette position de longues secondes, puis redresse son visage vers le sien. « Qu’est-ce que tu vas faire ? » qu’il demande, en trouvant ses yeux. Il s’inquiète toujours autant à son sujet. « Où est-ce que tu vas aller ? » Il s’inquiète de son sort, de ne pas savoir ce qu’elle va faire les jours à venir. Il craint aussi qu’elle replonge. Il n’en a tellement pas envie. Eneko dépose un baiser au creux de son cou, fait glisser ses lèvres le long de celui-ci, jusqu’à sa joue, jusqu’à ses lèvres qu’il finit par embrasser, furtivement, avec pudeur. « Je t’aime. » Il tient à ce qu’elle le sache, à ce qu’elle ne l’oublie pas. Eneko pose sa main sur son visage, caresse sa joue avec son pouce, s’attarde sur ses lèvres avec celui-ci. « Je ne regrette pas ce bout de chemin avec toi. » murmure-t-il, le cœur lourd. Ca aussi, il souhaite qu’elle le sache, qu’elle n’en doute pas. Ce n’est pas parce que ces derniers mois ont été particulièrement difficile qu’il regrette. La manière dont ça a évolué, certainement. Il aurait aimé que ça aille plus loin, il aurait aimé que ça dure des années. Mais il ne regrette absolument pas de l’avoir rencontrée. Elle lui a apporté beaucoup. « Je t’en prie… Prends soin de toi. Je t’en prie, Mao, ne replonge pas. Tu vaux mieux que tout ça. » murmure Eneko, en sentant les larmes rouler sur ses joues. Il ne peut plus se retenir et il se fiche bien de comment elle peut le percevoir, là. Il se fiche bien de paraître faible.

Il reste muet, il ne te coupe pas, il semble t'écouter. tu évites son regard, tu fais tout pour éviter ses deux iris. tu ne veux pas te perdre, tu as pris ta décision et ça te semble la meilleure chose à faire. tu ne peux plus revenir en arrière. il n'est pas heureux avec toi, il ne le sera jamais, tu le sais au fond de ton coeur, il mérite de vivre une belle histoire et non de s'accrocher à la votre. « Mao. » qu'il souffle finalement, tu t'arrêtes, t'arrêtes tes gestes pour l'observer. il s'avance vers toi, te force à lâcher ta valise. tu te laisses faire, tu la laisses tomber au sol alors qu'il s'arrête juste devant toi. avant que tu n'ais le temps de prononcer quoique ce soit, ses bras viennent t'encercler. tu laisses une larme s'échapper alors que tu sens son odeur t'enivrer. Eneko. tu ne pourras jamais l'oublier, tu le sais. il te serre, et tu te serres contre lui, pressant tes mains contre son torse. tu aimerais arrêter le temps, tu aimerais que tout s'arrête là, maintenant mais tu sais que tu ne peux rien y faire. vous restez ainsi, de longues secondes, peut-être même quelques minutes avant de vous séparer. tu es immédiatement happée par son regard.  « Qu’est-ce que tu vas faire ? Où est-ce que tu vas aller ? » qu'il te questionne immédiatement. tu n'as pourtant pas l'occasion de répondre que tu sens ses lèvres qui se perdent dans ton cou, qui remontent encore et encore, jusqu'à tes lèvres. il t'embrasse, c'est pur, c'est sain, c'est vivant et pourtant si triste.   « Je t’aime. Je ne regrette pas ce bout de chemin avec toi. Je t’en prie… Prends soin de toi. Je t’en prie, Mao, ne replonge pas. Tu vaux mieux que tout ça. » tu vois maintenant ses larmes qui perlent, qui se forment et qui vienne s'écouler le long de ses joues. tu te mets doucement sur la pointe des pieds, tes mains viennent encercler son visage et tu plantes ton regard dans le sien. « et toi tu vaux mieux que moi Neko. » que tu lui souffles simplement, tes pouces essuient consciencieusement ses joues.  « ne t'inquiète plus pour moi .. reprends ta vie, reprends là simplement Eneko, ne te laisse pas aller. je .. je t'aime aussi. » tu caresses un peu plus ses joues et tu viens à ton tour poser tes lèvres sur les siennes. « je prendrai soin de moi, du mieux que je peux, je te le promets. je vais .. je vais certainement aller .. je n'en sais rien encore mais je trouverai bien. j'irai chez mes parents si je ne trouve rien. » tu reviens capturer ses lèvres et tu lui offres ce baiser, ce baiser d'adieu. tu y mets tout ce que tu ressens, tout ce que tu ressens pour lui; tu l'embrasses comme si demain était le dernier jour de ta vie. c'est un peu ça quelque part. tu vis tes derniers instants avec lui, cet homme que tu as aimé à t'en tuer à petit feu, à t'en détruire. tu as le coeur en miette, tu as mal et pourtant tu retiens tes larmes, du mieux que tu peux. tu sais que si tu pleurs, tu n'arriveras jamais à partir, à le laisser là, derrière toi. « je ne peux pas tout te dire, alors je te l'ai écrit ..  » que tu souffles finalement, tu t'écartes doucement et tu recules. tu mets de la distance, parce qu'il faut que tu prennes de la distance pour partir.

« Arrête donc de te sous-estimer. » Le problème, c’est juste lui. Il aime Maona, il le sait très bien, mais il y a des choses qui continuent de faire mal, des choses qu’il n’arrive pas à oublier, pourtant il essaie, mais sa tête revient sans cesse dessus, parfois dans des moments où il ne s’y attend pas. « Je n’étais pas ta bonne personne, simplement. » Elle est belle Maona, elle est douce, elle est patiente aussi. C’est une femme extraordinaire. Il n’était juste pas le bon dans sa vie, mais il ne regrette absolument pas d’avoir fait partie de sa vie, comme il ne regrette pas qu’elle ait fait partie de la sienne. Et il sait qu’elle trouvera quelqu’un, un garçon de son âge, ou un peu plus âgé, qui lui donnera toute la force du monde, qui la fera sourire, parce que c’est ce qu’elle mérite. Il l’écoute attentivement, acquiesce d’un signe de la tête et profite du baiser qu’elle lui offre, alors qu’il ferme les yeux, qu’il se concentre sur ses larmes pour les arrêter. « Appelle ton père, tes parents. Appelle-les. Ne reste pas toute seule, ne retombe surtout pas, ne fais rien qui puisse te faire sombrer. » qu’il recommande, une dernière fois, en pressant ses lèvres contre les siennes lorsqu’elle lui offre un dernier baiser. Il fait glisser ses mains de ses épaules à ses bras. « Je la lirai. » Il ne sait pas quand, peut-être bien ce soir, peu après son départ, peut-être dans quelques jours, le temps de se remettre de ce qui vient de se passer, mais il la lira. Ce qui est écrit dans cette lettre, c’est précieux, ce sont ces dernières paroles qu’elle souhaitait exprimer, mais qu’elle ne peut pas face à lui, alors il s’y attardera plutôt deux fois qu’une. Il la laisse s’éloigner, se penche vers sa valise qu’il soulève. « Je t’accompagne où tu veux, laisse-moi au moins faire ça. » C’est dur d’être à ses côtés, de partager des derniers instants, comme ceux-là, de se dire qu’il n’y aura plus rien, que leur histoire se termine, après tant de choses partagées ensemble. Mais il ne peut pas la laisser comme ça, prendre simplement la porte. Il veut s’assurer qu’elle n’ira pas dans un bar, qu’elle sera bien accueillie par des personnes qui prendront soin d’elle, qui la soutiendront. Il a besoin de savoir qu’elle va aller bien, par la suite. Et puis s’il y a besoin, il est toujours là. Si Maona a besoin de lui, sa porte lui sera toujours ouverte. Elle a compté, elle compte toujours et ce sera toujours comme ça.