(Mads) Le sauveur sur son cheval blanc est arrivé

« Salut, désolé de te déranger, mais il faut que je m’absente, je me disais que tu pourrais… » Elle sait bien. Venir chez moi, garder les petits, comme elle le fait parfois. Ma voisine est chouette pour ça, pour m’arranger, même si j’ai l’impression d’abuser, de profiter un peu trop de ses services. Ca arrive au moins une fois par semaine. Elle me sourit, acquiesce d’un signe de tête. « Bien sûr, je peux faire ça. » Elle est un peu plus âgée que moi, de deux ans seulement, mais elle est arrangeante, nous propose de venir manger chez elle et ça fait plaisir à Sloan et les deux frangines. Je ne me sens pas seul… C’est tout le contraire de Mads en ce moment même. Je donne les dernières recommandations, bien qu’elle ait l’habitude et me hâte vers ma moto. Il a besoin de moi et je ne sais même pas pourquoi exactement, qui est cette ancienne connaissance, mais elle doit forcément lui rappeler des mauvais souvenirs, alors avant qu’il ne fasse une bêtise, je prends la route et prends la direction de ce bar que nous fréquentons régulièrement, au nom que Mads ne se souvient jamais et qui n’est pourtant pas bien compliqué, mais ça me fait sourire à chaque fois. Je me gare, entre et cherche immédiatement mon meilleur ami du regard. Je le trouve à une table, avec un verre entre ses mains. Il ne semble pas bien aller, si bien que je ne passe même pas par le comptoir pour commander ma boisson. Je pose ma main sur son épaule, pour annoncer mon arrivée, comme s’il ne l’avait pas remarqué. « Tu m’inquiètes, qu’est-ce qui se passe ? » J’ai vraiment pensé que j’allais le retrouver en train de péter un plomb dans ce bar, en train de fracasser la gueule d’un autre type et je suis bien soulagé de le voir encore bien installé. Je tire la chaise, la ramène plus près de lui, sans le quitter des yeux. « C’est qui cette personne ? Et c’est quoi l’histoire ? » Il en connait bien plus sur moi que je n’en connais sur lui, c’est certain. A Mads, je lui ai tout dit. Les coups que je me prenais par un ancien mec de ma mère, la mort de mon père qui m’a affecté, la façon dont je gère mes frères et sœurs, l’histoire avec mon ex, la façon dont elle s’est débarrassée de moi, pour une raison que je conçois tout à fait, pour une raison qui me pousse à ne plus m’engager sérieusement avec une fille. Il sait tout, tout, tout… Sauf pour Lisa, pour ce qui a failli se passer, une chose qu’il n’a pas besoin de savoir, parce qu’il ne s’est rien passé entre elle et moi. Je me suis repris au dernier moment, je me suis barré, en pensant à lui, parce qu’il ne mérite pas tout ça, qu’on lui fasse du mal. Il mérite d’avoir un très bon ami près de lui, qui le soutienne. C’est mon rôle.

Ce soir, tu sors tard du boulot. Le projet te prend plus de temps que prévu, parce qu’il y a pas mal de point à voir avec un ingénieur de l’armée. Ce mec est un insatisfait fini. Il n’est jamais content de ce que tu le propose. Tu l’aurais déjà encastré dans un mur, si ce n’était pas pour ton boulot. Tu sors de l’usine quand tu places enfin cette clope qui te manquait temps à la bouche. Tu l’allume rapidement et tu inspires à pleins poumons, avant d’expiré un important amas de fumée. T’es accros à cette merde. T’essaies d’arrêter depuis déjà un an, mais tu y arrives pas. Tu ne peux pas passer un jour sans fumée une latte. Enfin c’est toujours mieux la nicotine que cette foutu merde qui a tué ta demi-sœur. T’enfiles ton perfecto sur tes épaules, il fait un peu frais ce soir. T’es heureux, il ne pleut pas ce soir. T’aurais été trempe à ton retour à la maison. T’étais venu en bus, parce que t’avais laissé ta voiture au garage. T’étais qu’à une trentaine de minutes de chez toi à pied. Ça ne te ferait pas du mal de marcher. Au pire, si ça te saoul trop, tu appelleras un taxi. Tu regardes ton portable. Il n’est pas si tard que ça. Tu ne vas pas rentré de suite. Enfin, tu serais tenté, 0 cause de ton chien. Tu ne laisses jamais bien longtemps seul. Enfin, il supporte d’être seul dans le jardin quand tu bosses, mais si tu le laisses trop longtemps, il fait des dégâts. Un petit verre dans ton bar préféré ne te ferra pas de mal. T’arriveras jamais à retenir se foutu nom. T’as du mal, Luka se fou souvent de ta gueule. T’arrives au centre-ville en moins d’un quart d’heure. T’as retiré ton perfecto, parce que ce foutu blouson en cuir tient trop chaud. Quelques personnes t’observes. Tu as un style bien à toi. Enfin, t’es fringué comme les méchants garçons des années 50. Un vieux jean sombre sur tes hanches, un tee-shirt tout simple blanc, tes Dr Martens sombres au pied et une clope coincée à ton oreille percé d’un anneau. Vieux souvenir de tes quinze ans. Résultat d’une folie de ta sœur, tu l’avais vu arriver avec une aiguille chaude à la main de ta sœur et de l’autre, un coton imbibé de vodka. T’aurais pu tourner dans Grease ou Outsiders. T’avais la dégaine parfaite. Tu pousses la porte du bar. Le patron te salut. T’es ici depuis six ans et depuis six années, tu es fidèle à ce lui. Tu commendes un whisky et tu vas à une table. Tu patiente quelque instant avec qu’une serveuse t’apporte ton verre. Tu l’as remercié d’un faible sourire. Tu bois une première gorgée. Tu suis le parcours du liquide dans ton corps. Tu allais en prendre une gorgée de plus quand un rire te stop net. Tu connais se rire, c’est impossible. T’as du mal à croire ce que tu entends et tu vois. Ce mec, tu le connais, il ne devrait pas être là. Tu le croyais mort. Tu l’observes, il n’a pas changé. Toujours cette gueule de con. Il sent que tu dois l’observé, parce qu’il se retourne à ce moment. T’as pas dû changer, parce qu’il te fait ce sourire malsain et pervers qu’il avait quand il posait ses mains sur toi. Tu sais que s’il s’approche trop près, dit un truc de travers, tu risques de le tuer. Envoie un message à Luka, qui ne tarde pas à te répondre. Tu bois ton verre d’un trait. T’en commende un deuxième. Puis un troisième. Tu entames le quatrième quand tu sens une main sur épaule avant d’entre la voix de ton meilleur ami. « Tu m’inquiètes, qu’est-ce qui se passe ? » il s’installe en face de toi. Oui, tu l’inquiete, mais t’es inquiet toi aussi. Tu ne sais pas comment tu vas réagir. Si Luka n’avait pas été là, tu aurais surement attendu qu’il sorte pour le suivre. « C’est qui cette personne ? Et c’est quoi l’histoire ? » Tu restes silencieux avec de dire d’une voix rauque. « Ce mec … » Tu pointes du doigt ton premier beau-père « ce mec c’est mon premier beau-père. Il m’a… il m’a… » tu bégaies, ça sort pas. T’es tétanisé. T’arriveras jamais à le sortir. T’en a parlé qu’à Meth. Ta mère savait, parce qu’elle avait vu. Luka ne connaissait pas ton histoire en entier. Tu ne lui avais raconté ta vie à partir de tes sept ans, après que ta mère est retrouvé l’amour, le vrai.

Je tourne la tête, suis son index qui montre un homme. Il est bien plus âgé, il lui a fait du mal. C’est son ex-beau père et je vois bien que c’est grave. Mads ne termine pas sa phrase et je ne sais trop quoi imaginer. « Il a… » Il a quoi ? Je ne veux pas le brusquer, je pose ma main sur son bras pour l’apaiser, le calmer un peu. Je ne l’ai jamais vu comme ça, tétanisé à ce point. Je me rapproche encore plus près, regarde derrière moi pour remarquer que l’homme nous regarde, alors je m’arrange pour cacher sa silhouette à Mads, qu’il ne se focalise pas sur lui. « On peut bouger si tu veux, aller ailleurs, dans un autre coin du bar si tu ne veux pas partir d’ici. » Même si l’idée de choisir un autre coin signifierait qu’il a gagné, qu’il a eu ce qu’il voulait et je n’aime pas ça, mais c’est ce que ressent Mads qui a de l’importance et je ferai ce qu’il veut. Je lui propose une issue de secours. J’encercle ses épaules de mon bras, tente de l’apaiser en effleurant le haut de son dos avec mon pouce, puis tourne une nouvelle fois la tête pour lancer un regard noir à l’homme qui élargit son sourire et qui repose son attention sur sa table. C’est ça, qu’il regarde ailleurs. « Ca va, ça va, il ne te fera rien, d’accord ? » Pas alors que je suis ici, avec lui. Je ne suis qu’un petit jeune, mais quand on fait du mal à ceux qui comptent et avec toute la violence que j’étouffe depuis longtemps, je peux frapper. Il a l’air costaud lui, mais ça fait bien longtemps que j’ai arrêté d’avoir peur de ceux qui ont l’air de penser que c’est fun, de se défouler sur ceux qui sont inférieurs à eux, qui sont plus faibles. C’est comme ça qu’il a dû résonner lorsqu’il a fait du mal à Mads. C’était une cible facile à l’époque. Ca ne doit plus l’être maintenant. Je fais un signe au serveur de venir vers nous et il nous regarde, interloqué. « Y’a moyen d’avoir un Baileys et un peu d’eau pour mon pote s’teu plaît ? » Il acquiesce, prend la commande et disparaît. « Tu vois, ton preux chevalier s’occupe de tout. » dis-je, avec légèreté, en essayant de le détendre un peu.

« On peut bouger si tu veux, aller ailleurs, dans un autre coin du bar si tu ne veux pas partir d’ici. » Tu secoues la tête. Tu ne veux pas fuir. Tu ne veux plus redevenir ce gamin peureux que tu étais. Le Mads timide, renfermé est bien loin maintenant. T’as l’air d’un caïd maintenant. Un homme, un vrai ! Enfin, un homme brisé qui se planque sous cette putain de carapace. « Non, j’veux pas. J’suis assez grand pour me défendre maintenant. J’suis plus le petit garçon faible qu’il a brisé. » tu lâches petit à petit les informations qu’il manque à Luka. Il n’est pas au courant de cette partie noir de ton existence. Il ne sait pas pour les jumeaux, il ne sait pas ce que tu as endurait à cause de ses deux-là. Ni la violence qu’ils t’ont faite, il ne sait pas pour les fractures à répétitions. L’hôpital avait voulu te signaler aux affaires familiales te déclarent comme un enfant battu. T’avais juste dit que tu étais maladroit. « Ca va, ça va, il ne te fera rien, d’accord ? » t’espères. Parce que s’il tente quelque chose, tu es assez grand pour lever la main sur lui. Si tu fais ça, tu sais qu’il s’empressera d’aller au commissariat pour porter pleine contre toi. il s’est que la plainte contre le viol n’est plus d’actualité. Ça fait plus de dix ans maintenant. « Y’a moyen d’avoir un Baileys et un peu d’eau pour mon pote s’teu plaît ? » Luka ne veut qu’un verre d’eau. C’est un petit joueur ce soir. Par contre si le Baileys est pour toi, il a très mal choisi. Il sait que toi, ton alcool favori s’est le whisky. Izarre pour un scandinave non ? Puis tu captes qu’en fait le verre d’eau c’est pour ta poire « Un Bailey ? j’aime pas ça moi. Attend merde pourquoi un verre d’eau ? c’est pour moi ? J’suis pas à boire un verre d’eau mec. » Tu secoues énergiquement la tête et tu rappelles la serveuse « M’zelle ramenez moi un autre verre de whisky. » Seulement, tu vois que ton meilleur ami lui fait signe que non. Elle ne sait plus qui écouter. Tu reportes ton attention sur ton meilleur ami qui essai tant bien que mal à te calme. Ça marche quand même. t’es moins tendu et tétéanisé.  « Tu vois, ton preux chevalier s’occupe de tout. » tu ris doucement « Mouai, si je serais une gonzesse j’t’aurais sauté dessus pour te remercier, mais j’suis pas encore pd. J’suis pas passé de l’autre côté. » Taimes trop les femmes pour ça. tu préfères leurs courbes que les hommes. Puis depuis ce qu’il t’avait fait, tu ne pouvais pas être avec un homme même si tu avais été gay. « P’tain j’arrete de boire, j’dis des conneries. » tu lèves le doigts comme à l'école et tu beugles comme un veau saoul. bah ouai, t'as trop vite but. « Un verre d’eau m’zelle.» La pauvre blonde te regard d’un air complètement paumé. Ouai, tu sais plus ce que tu veux et alors. T’es comme ça, t’es contradictoire comme mec. « drittsekken » tu sers les points. Tu sais que c’est pour toi. Que cette injure est pour toi. ta mère lui avait fait part de comment tu avais été conçu. Tu n’as pas de père. Enfin si, comme tout le monde, mais tu ne connais pas son identité. Tu sais que t’es un bâtard. Il veut te faire réagir. Que tu deviennes fou. « Luka, comment j’pourrais faire pour tuer ce mec, sans que personne le sache. »

Mads m’inquiète, beaucoup. Il a l’air… Je ne sais pas. Il fait face à quelque chose qui le dépasse, j’ai l’impression. Ce gars, là-bas, il lui a fait beaucoup de mal et je ne peux m’empêcher d’imaginer le pire. Il lui a fait quoi ? Il n’a pas terminé sa phrase, alors toutes les options sont bonnes et je n’aime pas ce qui tourne en boucle dans ma caboche. Mads, c’est mon meilleur ami. Quand il a mal, j’ai mal. C’est l’une des personnes qui comptent le plus pour moi, alors je suis patient, je lui montre que je suis là… Que je peux l’écouter, aussi… Je ne souhaite pas qu’il ait peur de ce que je peux en penser. Je ne le jugerai jamais, Mads. Je suis là pour le remettre sur les rails lorsqu’il est dans le besoin, mais je ne le jugerai pas. Et là, il a besoin de moi… Il a besoin que je le recadre un peu, aussi. « Pas d’alcool, abuse pas trop. » Ce n’est pas le moment de chuter parce qu’il y a un fantôme du passé qui surgit, ce serait donner raison à cet homme de continuer à le pourrir. « Moi non plus, mais je pourrais, pour toi. » Je souris, je plaisante. Je ne me suis jamais posé de questions sur mon orientation. Les filles me plaisent. Je n’ai rien contre les homosexuels, mais je ne le suis pas, non. Je tourne la tête vers la serveuse qui lâche un souffle et je lui fais signe de lui servir un verre d’eau, plutôt qu’un Whisky et repose mon attention, un court instant, sur cet homme qui a dit un mot dont je ne comprends pas le sens. Je ne sais pas ce qu’il a, mais il souhaite chercher la merde. « Arrête. Stop. » Ca me choque de l’entendre me poser cette question, ça me choque qu’il y pense. Mes yeux témoignent de ma surprise. « Putain Mads, fais pas de connerie. Tu ne vas pas t’embarquer dans ce genre de conneries pour ce mec qui ne le mérite pas. » Je presse de nouveau ma main sur son bras, inquiet de ce qu’il pourrait faire. Il est tellement mal, semble tellement sérieux qu’il me fait peur. « Pense à Lisa. » C’est sa petite amie, elle compte pour lui, il y tient. « Elle n’a pas besoin d’un gars qui soit derrière les barreaux. » Elle a besoin d’un mec bien présent, d’un gars qui pourra prendre soin d’elle, parce qu’elle non plus, elle ne va pas bien. Il faudrait qu’ils se soutiennent tous les deux, si encore ils arrivaient à se parler, à se dire les choses pour avancer tous les deux. « Qu’est-ce qu’il t’a fait ? » murmuré-je, de nouveau. Il n’a pas terminé sa phrase. Il paniquait. Mais j’ai besoin de comprendre, de savoir, à moins qu’il me dise qu’il n’a pas envie d’en parler, à moins qu’il ne soit pas prêt et dans ce cas, j’accepterai.

« Arrête. Stop. Putain Mads, fais pas de connerie. Tu ne vas pas t’embarquer dans ce genre de conneries pour ce mec qui ne le mérite pas. Pense à Lisa. » Lisa ! Quand t’entend le prénom de ta copine, tu reviens doucement à la réalité. Tu te rends compte que tu dis des conneries. Si quelqu’un entendait ta discussion avec Luka, il aurait pu penser que tu avais des intentions mauvaises et aurait surement appelé les flics. T’essais de te reprendre. Ce n’est pas la meilleure des solutions. Ignore-le et ça le fera encore plus chier. Tu vois son petit sourire malsain sur le visage. T’as envie de lui mettre une patate dans le visage, mais tu te retiens. Calme-toi Mads, écoute ton ami. « Elle n’a pas besoin d’un gars qui soit derrière les barreaux. » Tu hoches la tête. Elle n’a vraiment pas besoin de ça, c’est déjà tendu entre vous, tu vas pas rajouter un petit ami derrière les barreaux à la liste. « Qu’est-ce qu’il t’a fait ? » « qu’est-ce qu’ils m’ont fait, tu devrais me demander » « ses jumeaux et lui ont brisés ma vie. J’avais quatre ans à l’époque, je me remettais doucement de la mort de ma grand-mère. Elle était morte devant mes yeux, elle avait fait une crise cardiaque. Ma mère est revenue avec un mari et deux gosses quelques jours avant Noel. Elle m’avait dit que c’était ma nouvelle famille. Les deux premiers mois, j’étais heureux de ne plus être seul, puis les coups on commençait. Ses fils m’ont fait connaitre les urgences de fond en comble. J’ai la plus grande partie de mes os fracturés. L’hôpital a failli porte pleine contre ma mère. Ils pensaient que ma mère me battait. Je leur ai fait croire que j’étais juste maladroit. Ils m’ont cru. Après ça, ils se sont arrêtes, j’ai cru avoir la paix. Enfin ! Quinze jours se sont passés est cela à reprit. Pas physiquement, mais moralement. Ils disaient des choses. Parfois, j’en cauchemarde encore. Je me réveille en panique, bien souvent quand Lisa n’est pas avec moi. Même si ça fait dix-huit ans que c’est passé, j’ai encore mes vieux démons en moi. Puis ce n’est pas le pire. » Tu vois bien dans les yeux du mannequin qu’il s’attendait à ce que ton récit s’arrête là. Seulement ce n’est pas fini. Ton calvaire a encore duré. Après les fils, se fut au tour du père. Tu baisses les yeux, tu regardes le verre d’eau que la serveuse à poser devant toi. Tu sers tes mains autour du récipient en verre. Si tu sers encore, le verre risque d’exploser. « Cet homme, Frans a abusé pendant un an. Il m’a violé quand j’avais cinq ans. Si ma mère n’était pas rentrée un soir pour lui faire une surprise, mon calvaire aurait encore continué. Elle nous a trouvé sur mon lit d’enfant. Lui sur moi, moi en pleurs. Le soir même, elle m’a amené avec elle au commissariat pour déposer plainte et pour faire constater que j’avais été violé par mon beau-père. Ma mère a divorcé rapidement. Puis on a fuis la Norvège, pour les Pays-Bas. Elle avait un ami d’enfance là-bas. Son premier amour. Pas mon père, parce que je ne sais pas qui sait. Elle est tombée enceinte quelques mois plus tard. Mon nouveau beau-père est quelqu’un de bien. J’ai eu une vie un peu plus calme. » Tu bois un coup d’eau.   « Tu as dû entendre un mot juste à l’instant. Drittsekken. Ça veut dire bâtard en norvégien. Il sait que je suis le fruit d’un coup vite fait dans une voiture. » Voilà Luka sait tout maintenant. « Est-ce que tu comprends maintenant pourquoi j’ai envie de descendre ce type ? » Tu le regardes alors dans les yeux. Tu attends de voir la réaction de Luka. De voir s’il part ? S’il reste ?  

Mads parle, me donne plein d’informations en même temps, raconte son histoire et je ne dis rien tout au long. Je l’écoute, plisse les yeux quand il est question de l’hôpital. J’arrive pas à croire qu’ils n’ont pas été cherchés plus loin. Maladroit ? Mais qui gobe ça de nos jours ? Il y a encore des gens pour se mettre des œillères, mais quand même… Il y aurait dû avoir une enquête de faite, les services de protection de l’enfance auraient dû être contactés. Ca me tue de savoir qu’ils n’ont pas fait leur boulot correctement. Mads me fait de la peine quand il me conte son histoire, je ferme les yeux un court instant en apprenant que cet homme a abusé de lui. Mon cœur se resserre, saigne. J’ai mal pour lui. Je pose ma main sur la sienne, la resserre avec tendresse. « Je suis là pour toi. » Ce n’est pas énorme après tout ce qu’il vient de me dire, mais est-ce utile de commenter ? Il n’y a rien à dire. C’est horrible. Cet homme ne mérite pas la vie… « Je comprends… Mais ne fais pas de bêtises. » Ca n’aurait pas de très bonnes conséquences. Il en prendrait pour son grade, il serait puni pour s’être fait justice soi-même et c’est uniquement pour ça et parce que je n’ai pas envie qu’il ait du sang sur ses mains que je ne souhaite pas qu’il aille lui faire la peau. Mads ne mérite pas de terminer sa vie derrière les barreaux d’une prison, à survivre avec des lettres. « Qu’est-ce qu’il fiche ici ? » J’ai compris qu’il était en Norvège, qu’ils avaient pris la fuite, alors je me la pose la question. Qu’est-ce qu’il fiche en France ? Au fond, est-ce qu’on doit donner tant d’importance à la raison ? Il est là, c’est bien tout ce qui compte. Je ne me sens plus trop à l’aise d’un coup, pas à cause de Mads, mais à cause de lui qui me dégoûte. Ce type que je ne veux pas connaître, ce type qui est odieux. « Et… » Je me mords la lèvre, de peur de le blesser. « Et elle n’a rien fait de plus ? » Mais je l’interroge tout de même. Sa mère, elle n’a rien fait à part divorcer et fuir le pays ? C’est déjà beaucoup… Mais ça ne m’aurait tellement pas suffit, à moi. Savoir cet homme en liberté, alors qu’il a pourri la vie de mon enfant, ça m’aurait mis hors de moi. J’aurais été capable du pire. Je manque de contrôle sur moi. Et ça ne m’aurait pas aidé. Alors c’est vrai, je peine à comprendre pourquoi elle n’a pas fait les démarches nécessaires pour l’envoyer au fond du trou. Peut-être était-ce une procédure trop lourde, même pour Mads. « Tu… Tu ne veux pas qu’on parte ? » Cette fois, ce n’est pas pour lui, c’est pour moi. J’étouffe dans la même pièce que l’autre gars. Je suis tellement en colère contre tout ce qu’il a fait, contre lui pour avoir faire du mal à Mads. Je bois tout de même mon Baileys, par besoin d’alcool plus que pour le déguster. Faire passer tout ça. Je m’en voudrai presque de ne pas l’avoir connu avant, de ne pas avoir été là pour le soutenir.

« Je suis là pour toi. Je comprends… Mais ne fais pas de bêtises. » tu secoues la tête comme un gosse qu’on réprimande, non tu ne vas pas faire de bêtises. Tu penses à Lisa, ça lui ferait quoi de savoir que tu as tuer un homme. « Qu’est-ce qu’il fiche ici ? » tu ne sais pas non plus ce qu’il fait ici. tu n’avais pas penser le revoir un jour   « je ne sais pas, je le croyais mort depuis… » tu te stoppe, tu repenses à la dernière nuit que vous avez passés toi et ta mère à Grimstad. Cette nuit où tu pensais que tout était définitivement fini.« Et… Et elle n’a rien fait de plus ? » tu sers le point, il n’a pas le droit de te demander ça.  Il n’a pas le droit de te dire ça. Non pas lui. Il se bat peut-être pour avoir la garde de ses frères et sœurs, mais il ne sait pas par où ta mère est passée. Quand vous vous êtes installé chez Jan, ta mère a dû suivre un psychologue pendant six ans. Elle a même dû faire un séjour en hôpital psychiatrique pour   « Non, elle aurait aimée, mais Frans lui a fait peur. Il s’est introduit dans notre chambre d’hôtel la veille qu’on parte. Elle a réussi à l’assommer. Je l’ai vu tombé au sol, du sang collaient de son crâne. J’ai cru que le calvaire était fini, j’ai cru qu’elle l’avait tuée et qu’on pouvait partir tranquillement. Voilà pourquoi elle n’a rien fait, on a fui la chambre d’hôtel alors qu’il gisait au sol, sans vie. » tu prends ta tête entre tes mains. Tu avais tellement voulu qu’il soit mort. Pour toi, Frans fessait parti d’un passé oublié. Tu avais tellement voulu qu’il soit mort cette nuit-là, que tu as cru que s’était réel. Tu le pensais mort, tu le pensais loin de toi définitivement, tu pensais qu’il ne viendrait plus te tourmenter et pourtant aujourd’hui, il est à quelques mettre de toi. il te regard avec ce même regard, ce regard qui te scruter perversement quand ses doigts caressaient ta peau juvénile. « Tu… Tu ne veux pas qu’on parte ? » que te demande ton meilleur ami. T’as envie de sortir oui, mais t’as aussi envie de lui faire face. De lui montrer que tu n’as pas peur de lui, que tu n’as plus peur de lui. Seulement maintenant que Luka sait, il doit avoir lui aussi des envies de meurtre. Il n’est pas bon pour chacun de vous de rester à cette table en face de lui. « oui je veux bien avant… avant de … »  tu  sais pas ce que tu veux faire, mais tu veux lui faire regretter tout ce qu’il t’a fait

« D’accord. » dis-je, simplement, en comprenant mieux la réaction de sa mère. Elle n’a rien fait parce qu’elle le pensait mort. Elle a protégé son fils, elle s’est montrée présente pour lui et c’est tout ce qui compte. Elle a été une vraie maman pour son enfant, jusqu’au bout. Je pose ma main sur les siennes, le soutient autant que je peux, avant de me lever avec lui. Il accepte qu’on parte. La consommation est payée, il y a quelques pièces sur la table. Nous nous dirigeons vers la sortie et je jette un dernier regard sur l’homme toujours assis à la table. Il relève les yeux vers nous, mais je n’y fais pas plus attention, pousse la porte et très vite, nous nous retrouvons à l’extérieur du bar. Je me tourne vers Mads, l’air inquiet. « Tu veux dormir à la maison ? » Ma mère n’est pas là, il le sait et peut-être bien que ça lui ferait du bien de ne pas être seul. Je ne peux pas le laisser comme ça, rentrer simplement et penser à tout ce qui s’est passé ce soir et avant. J’y penserai toute la soirée aussi. Il a besoin de moi, je le sens. « J’ai de quoi nourrir toute la bande. Je les couche et on se fait un film ensuite, t’en dis quoi ? » Avant qu’il ne pense à refuser, j’ajoute : « D’autant plus qu’il faut que je te demande des nouvelles de toi et Lisa. De ce qui se passe entre vous en ce moment. » La dernière fois, elle n’allait pas bien, mais elle m’avait aussi dit qu’elle irait voir Mads. Et puis maintenant, les choses se sont arrangées entre elle et moi. Et avec la photo qu’il a postée sur Instagram et les commentaires, j’ose penser qu’ils se sont revus, qu’ils ont mis les choses à plat, tous les deux, mais je ne serai pas étonnée s’ils me disaient qu’ils se sont encore pris la tête. C’est comme ça, lui et elle et c’est de cette manière qu’ils s’aiment. C’est fusionnel, ça compte beaucoup. Ils ne se comprennent pas toujours, mais ça se voit, à l’extérieur, qu’ils tiennent l’un à l’autre. Je passe mes mains sur ma nuque, penche la tête en arrière et jette un œil sur ma moto. Il y a les deux casques, il peut monter, m’accompagner s’il le souhaite.

Tu es un peu titubant. Tu n’as pas mangé depuis la veille et tu as ingérer un peu trop d’alcool en un lapse de temps très court. Tu n’es pas loin d’être saoul, non tu es saoul. Tu es ivre, ça fait longtemps que tu ne t’as pas mis dans un état pareil. « Tu veux dormir à la maison ? » tu ne mets pas longtemps à reflechir à la réponse que tu vas lui donner. C’est tellement évident. « Heu oui, j’me sens pas de passer la nuit seul. Je risque de vouloir le retrouver pour lui casser la gueule. Je ne veux pas qu’il me pousse à faire une connerie. » « J’ai de quoi nourrir toute la bande. Je les couche et on se fait un film ensuite, t’en dis quoi ? » t’es soaul, t’es con, t’as faim alors tu sais plus ce que tu lui dis « Une soirée entre gonzesse ? je t’avertis mec, je suis en couple et je vais pas te tripoter pendant tout le film » que tu lui dit en plaisantant. T’es con parfois, mais tu te sens bien avec Luka. Luka ton meilleur ami. Luka ton frère spirituel. Parfois tu remercies le bon dieu – même si tu n’y crois – de l’avoir fait tomber en panne juste devant toi. tu l’as aider et tu as tout de suite arroche. Un coup de foudre amical « D’autant plus qu’il faut que je te demande des nouvelles de toi et Lisa. De ce qui se passe entre vous en ce moment. » oui avec Lisa ça va mieux, vous vous êtes vu la veille. Les choses se sont plus ou moins arranger. Tu lui as dit pour Meth, tu lui as dit une partie de ton histoire. Tu ne lui parleras pas de la partie où Frans est inclut. Non, celle-là, tu veux lui épargner. Tu n’es pas près de lui dire. Tu ne veux pas qu’elle est pitié de toi. Tu veux qu’elle te hurle dessus, tu veux qu’elle te saute dessus, qu’elle soit furieuse contre toi, mais tu ne veux pas qu’elle est de la pitié pour toi.   « Mec t’avait prévu le coup hein ?»que tu lui dis en posant ton épaule autour de son cou. « Tu veux vraiment que je te tripote hein. Tu me fais le coup de la moto pour que j’aie mon corps contre le tien ? » tu finis rapidement la clope que tu as allumé en sortant. « Non sérieux, depuis le temps que je rêve de monter sur ton bolide. » tu t’approches alors de sa moto. Tu es comme un gosse qui bave devant un gâteau qui sort du four.      

Ca me soulage qu’il accepte, parce que je le sentais comme ça moi aussi. Mads allait faire une bêtise s’il restait seul. Je le supporterai mal, je ne le supporterai pas tout court s’il lui arrivait une bricole. « Ouais, un truc comme ça. » dis-je, en affichant un sourire, amusé par son humour. Il est con parfois, avec ses blagues, mais elles me font bien marrer. Je rentre dans son jeu : « Oh, Mads, tu ne vas pas pouvoir me résister bien longtemps, faut arrêter de te mentir et tomber dans mes filets. » Je lui tends le casque, mets le mien sur ma tête et éclate de rire à sa remarque. « C’est exactement ça ! Tu m’as grillé, alors que j’essayais d’être le plus discret du monde. C’est un peu foutu pour moi. Je compte sur toi pour ne pas le balancer à Lisa, elle va vouloir me faire la peau si elle apprend que je fais les yeux doux à son mec. » Du coin de l’œil, je le vois en train de zieuter ma bécane. Je comprends, moi aussi j’en suis amoureux. C’est une merveille. Je préfère vendre toutes mes fringues, ma veste en cuir, que la vendre elle. C’est mon moyen de transport pour lequel j’ai économisé pendant des années et même avec la voiture d’occasion que j’essaie de me payer pour les terreurs, je sais très bien que je ne m’en séparerai pas, que je prendrai bien plus plaisir sur ma moto qu’ailleurs. Elle me donne une sensation de liberté. « Allez monte. » Je lui fais signe, alors que je prends place sur ma bécane, attendant qu’il se retrouve derrière moi pour prendre la route. Elle fait du bruit, elle va vite, elle me caresse le visage, elle me donne froid, chaud en même temps. C’est une meilleure sensation que celle que j’ai ressenti avec l’ex beau-père. Je profite d’un feu rouge pour demander : « Alors, avec Lisa ? »

« C’est exactement ça ! Tu m’as grillé, alors que j’essayais d’être le plus discret du monde. C’est un peu foutu pour moi. Je compte sur toi pour ne pas le balancer à Lisa, elle va vouloir me faire la peau si elle apprend que je fais les yeux doux à son mec. » vous êtes cons ensemble, mais ça te fais du bien être aussi simple avec quelqu’un. Avec une personne qui te connaît très bien qui sait tout de toi, tu n’as plus besoin de cacher les zones d’ombres de ta vie. Il sait tout.   « j’vais lui envoyer un message de tes avances. Merde échec de l’envoi. Tu as de la chance, tu ne seras pas castré encore. » tu ranges ton portable dans ton blouson et tu attends qu’il t’autorise à monter. « Allez monter. »tu acquiesces, enfin tu vas pouvoir monter sur son bolide. Il ne sait pas lui encore pour Le Montre. Il ne sait pas que tu bricoles une vieille mustang noir dans ton garage quand tu es seul. Il ne sait pas encore qu’il ne te reste plus que quelques réglages et elle sera enfin sur la route. Tu ne lui dis pas parce que t’as peur que ça soit stupide à ses yeux. Tu ne lui dis pas parce que tu veux qu’il soit le premier à faire ton premier trajet. Tu te sens libre quand il commence à rouler. Tu as la sensation d’être libéré de tout quand tu sens le vent caressait ton visage « bordel, tu vas me faire avoir un orgasme avant l’heure »que tu lui dis en riant. T’es con, mais t’es un con heureux à cet instant. Puis il s’arrête à un feu et te pose la question qu’il meurt d’envie de savoir depuis surement une semaine. Une semaine où tu n’as plus eu Lisa dans ta vie. Une semaine où tu as dit à Luka comment elle te manquer. Seulement ta fierté mal placé t’a empêché de lui dire à elle  « Alors, avec Lisa ? » tu te racles la gorges « on s’est vu hier. Je lui laisse du temps, elle ne veut pas me dire ce qu’il se passe dans sa tête, alors je lui laisse le temps qu’il lui faudra. Puis je lui est enfin dit pour Meth.» tu lui laisses le temps qu’il lui faudra, tu veux être patient pour elle. tu veux pas la perdre, non tu veux pas. « j’crois que je suis fou de ce petit bout de femme. J’pensais que jamais de ma vie, j’serais autant attaché à quelqu’un » le feu passe au vert, tu lui tapotes l’épaule avant qu’il ne redémarre et lui dit « en j’t’aime aussi, mais c’est pas pareil. »

« La chance… » soufflé-je, en arborant un sourire. Lisa, elle y tient à son Mads. Elle pourrait tuer sur place la personne qui drague son petit ami, mais moi… Elle prendrait ça à la rigolade, certainement, pour une blague débile entre meilleurs potes. Je démarre, jusqu’à ce feu rouge et la question file entre mes lèvres. J’acquiesce d’un signe de tête. C’est une bonne idée de lui laisser du temps, de ne pas la brusquer, elle n’a pas besoin de ça. « C’est bien que tu lui en aies parlé. » Elle tient à lui, elle souhaite juste le connaître, mais faut qu’ils se laissent un peu de temps, voilà tout. Faut qu’ils se laissent le bénéfice du doute, aussi, quand ils se méfient de quelque chose. J’en sais rien, moi et les relations, je ne sais pas les gérer, alors je les félicite d’avance pour tout ce qu’ils subissent ensemble au quotidien. J’affiche un sourire qu’il ne peut voir, amusé par sa déclaration d’amour. « J’espère bien que ce n’est pas pareil. Lisa aurait été vexée et j’aurais pris peur. » Les mecs, pas mon truc. J’aime les nanas, celles qui sont fines, celles qui sont normales, ou avec un peu plus de forme. Je les aime, elles. J’en suis clairement attirée, mais je ne les regarde pas vraiment. Depuis ma dernière relation, je n’en ai pas dragué une seule tant ce n’est pas ma priorité. Si, il y a bien eu ce rapprochement avec Lisa, mais c’était un moment d’égarement, rien de plus. « Moi aussi, j’t’aime. » Et c’est vrai, je l’aime ce gars. Mads, c’est mon meilleur ami, une partie de ma vie. Il compte, tellement qu’il me fait peur, souvent, avec ses réactions. Je reprends la route, prenant la direction de mon chez moi, pour prolonger la soirée.

HJ : Je termine ce sujet, mais on s'en recommence un quand tu veux. <3 Ou par texto !