(venus) règlement de compte à ok corral

elle m’avait contactée. je l’avais pas vu vraiment beaucoup, ou souvent en coup de vent. comme quand elle rentre et que je suis sous la douche avant de partir pour le boulot, ou quand j’arrive c’est elle qui part. mais elle sait qui je suis et je sais qui elle est. et c’est déjà assez. Venus doit être au courant. forcément en même temps, Mercure c’est pas seulement son frère, c’est son jumeau. c’est un lien particulier. même si je suis très proche d’Artie, je peux pas vraiment savoir ce qui unit des jumeaux hein. j’avais pas vraiment peur. mais je n’étais pas non plus vraiment confiante. le phare de Biarritz n’étais pas forcément le lieu de rendez-vous que j’aurais choisi mais il faut avouer qu’il était à la fois assez touristique pour ne pas être seules l’une avec l’autre réellement ni assez fréquenté pour que l’on soit dérangée non plus.

est ce que c’était en rapport avec Mercure? je supposais bien qu’elle soit restée plutôt vague. il n’y avait pas grand chose d’autre qui nous « unissait » en réalité. alors oui, elle savait que j’étais enceinte et j’imaginais que c’était le discours de type « fais pas de mal à mon frère » ou comme quoi elle allait me péter les rotules si je lui donnait des faux-espoirs. mais voila, moi j’avais jamais rien promis à Mercure, j’avais aucune attache avec lui hormis le sexe qui était formidable. c’était tout, j’voulais pas de mariage, maison, chien ou gosse. non avoir un gosse c’était pas prévu du tout. vraiment pas! surtout qu’il y avait 50% de chance pour que ça soit l’enfant de Vitali … je faisais donc les cents pas devant la mer, laissant mes cheveux détachés jouer dans le vent. mon épaule encore un peu douloureuse m’emmerdait mais je feignais de ne pas y prêter attention. le déni c’était ça, mettre sur le compte d’un balle une douleur liée à une maladie incurable qu’il n’y a que les « vieux » qui choppent normalement … elle n’allait pas tarder. je fermais les yeux et pris une grande inspiration.

j’me demandais vraiment ce qu’elle me voulait, c’était pas forcément très malin de ma part d’y être allée. mais enfin pourquoi pas. j’avais aussi aucune raison de ne pas y aller, je me demandais vraiment quel était le discours qu’elle allait me servir. non j’étais pas vraiment inquiète. surprise surtout. c’était pas bien dur de trouver mon numéro via Mercure. état il au courant d’ailleurs de cette entrevue entre sa jumelle et son « amante »? qui sait. peut être que je devrais lui envoyer un message pour savoir s’il savait pourquoi sa soeur voulait me parler … mais y’avait ce côté curieux en moi qui voulait ne pas le faire, qui voulait aller voir. c’était plus fort que moi. j’étais une curieuse de première. et peut être aussi que quelque part je voulais savoir ce qu’elle pensait de tout ça. évidemment elle était au courant de Mercure et moi, elle n’étais pas conne on s’était déjà croisées. pour le bébé une nouvelle fois, Mercure le lui avait surement déjà dit. il avait l’air tellement heureux quand je le lui ai dit. mais c’était pas une situation facile. j’avais quand même décidé d’y aller, parce que la flic en moi voulait savoir. mette mon nez pas toujours au bon endroit c’était mon plus gros défaut. mais bon. qu’est ce qui pouvait bien se passer hein?

l’épaule douloureuse je me concentrais sur le vent que je sentais parcourir mes cheveux les faisant virevolter dans le vent. « bonjour. » sa voix me sortit de mes pensées. je me retournais vers elle. « bonjour Vénus » dis-je en restant sur place. impossible de savoir la conduite à adopter. on n’était pas proches. pas des inconnues non plus mais … hm. passons. Son visage était un peu strict et elle repris tout de suite la parole. « j'aime pas tourner autour du pot, donc je vais pas le faire. quand tu... vous ? -ça te dérange si je te tutoie?- étais dans la douche l'autre jour, j'ai fait tomber ton sac, et y a un papier qui est tombé. j'ai voulu le plier, pour pas le mettre en boule dans ton sac -y a rien de plus chiant que ça- sauf que j'ai vu quelque chose. le papier disait, de ce que j'ai lu, que tu avais une maladie, qu'on appelle maladie de charcot. j'y connais rien en maladies, à part celles liées à la croissance, quand je faisais de la danse. alors j'ai fait des recherches. tu l'as vraiment ? tu as vraiment cette maladie ? » ce fut comme un coup de massue et il me fut un peu de temps pour pouvoir assimiler la nouvelle. elle savait. immédiatement je posais ma main sur mon ventre. instinctivement je dirais. elle savait … pour la maladie. pour le bébé. pour … ce que ça pouvait impliquer. et elle me demandait si je l’avais vraiment. j’avais de toutes mes forces envie de mentir. envie de lui dire que non. qu’il ne faut pas croire les médecins. qu’il … « c’est un truc rare. y’a que les vieux qui « attrapent » ça … » enfin ça ne s’attrape pas. je reculais un peu et m’adossais au mur. je savais pas quoi lui répondre. je ne savais pas quoi me dire moi même. « mais c’est ce qu’ils disent. » je sentis une boule se nouer dans ma gorge et les larmes monter à mes yeux. « moi j’y crois pas … » et pourtant je sentais la douleur à mon épaule me tirailler. sauf que depuis le temps la blessure par balle n’était plus qu’une excuse. « mais … » je tendais mon bras gauche devant elle. il était crispé et tremblant. c’était pas normal. une larme coula sur ma joue.

oui bien sûr je ressentait de la colère au fait qu’elle me lance ça comme ça sans prendre réellement de pincettes. mais en même temps pourquoi en aurait elle pris, on ne se connaissais pas, j’étais rien pour elle, enfin hormis celle qui porte peut être son neveu ou sa nièce. mais en l’occurence il n’y a pas encore de bébé physique, « palpable », alors oui pourquoi s’embarrasserait elle de gentillesse. et je devais aussi admettre que ça me faisait aussi du bien. de me mettre dos au mur, face à mes responsabilité face à ce qui va advenir et que je fuis depuis trop longtemps. oui je ne me sentais pas bien, oui c’étais pas plaisant à entendre. mais peut être que si elle m’en parlait c’était que quelque part ça la touchait, même si elle s’en rendait pas compte. je ne lui en voulais finalement pas, comment lui en vouloir, à sa place j’aurais probablement réagi pareil, et peut être même pire avec tout mon passé de flic. alors non je ne lui en voulais pas, je m’en voulais à moi de toutes manières plus qu’à quiconque autre. c’était moi la responsable là dedans. j’essayais d’expliquer, « on dit la même chose du cancer, et pourtant, les leucémies touchent majoritairement les jeunes enfants. » touché. j’y croyais pas à cette maladie, jusqu’à ce que ça soit elle qui me la mette sous le nez. pourtant les médecins me l’avaient dit des millions de fois alors pourquoi avec elle spécialement ça n’avait pas le même impact! aucune idée. mais j’avais besoin de ça. j’étais perdue, totalement perdue et je ne savais pas quoi faire du tout. et pour une fois, je montrais ma faiblesse à quelqu’un. a une presque inconnue, peut être que c’était pour ça que ça me semblait aussi facile. « tu veux qu'on aille s'asseoir pour en discuter ? je suis désolée d'avoir été aussi brutale mais... ça me semblait être le mieux. » je haussais les épaules. « t’en fais pas. je … je te comprends tout à fait » j’esquisse un sourire et « range » ma main bizarre. « au moins ça prouve que tu tiens à Mercure et ça c’est tout à ton honneur » dis-je en posant un regard admiratif sur elle. « je crois que j’avais besoin de ça. que tu sois … brutale avec moi … » je m’adossais au muret et passais ma main dans mes cheveux avant de la ramener sur mon front. je commençais à rire nerveusement. « c’est con … » les nerfs lâchent tout d’un coup . « je … tu devrais faire médecin t’as réussi en quelques secondes à me faire réaliser la chose alors que les médecins en trois mois ont rien fait du tout » c’était tellement ironique.

C’était bizarre car je ne pensais pas forcément pouvoir m’entendre avec elle. Je ne la connaissais pas beaucoup, il fallait bien l’avouer, mais en même temps, il y avait ces regards lourds qu’elle me lançait quand on se croisait parfois chez eux. J’avais l’impression de ne pas être la bienvenue, de ne pas être à ma place. Et bien que ça ne risque pas de changer ma présence, quelque part ça me mettait mal à l’aise. Mais je comprenais cependant tout à fait son attitude, elle prenait soin de son frère, son frère jumeau de qui plus est. Je ferais tout à fait la même chose envers Arthur. Ca ne faisait aucun doute! Elle était franche, mais c’était selon moi plus une qualité qu’un défaut. Car je considérais ce trait de caractère comme très important au moins elle ne tournait pas autour du pot ou prenait des pincettes, elle parlait de ce dont elle voulait, quand elle le voulait. C’était pas mal et d’ailleurs quelque part pour ce qui était de la maladie, qu’elle me balançait comme ça en plein visage, j’en avais même besoin. Sa dureté, sa rudesse. Me fait comprendre la dure réalité de ma maladie, en parler avec quelqu’un d’autre qu’un professionnel est « fatal » et surtout me met au pied du mur. « c'est mon abruti de petit frère, c'est normal. il a beau faire le dur, je suis encore celle qui le connaît le mieux. et je veux être là si jamais... il t'arrive quelque chose. » je souris un petit peu. Elle n’était pas obligée d’être gentille, hormis qu’elle allait peut être être la tata du bébé que je portais, nous n’avions pas beaucoup en commun. « Oui ça je n’en doute pas. Il est très attaché à toi et aura besoin de toi » dis-je un peu évasive. Oui il est certain que si jamais il m’arrive quelque chose, ça ne lui fera pas plaisir, enfant ou pas. Bien sûr notre relation n’a rien d’une relation conventionnelle, et s’il n’y a pas d’amour entre Mercure et moi, il y a quand même un attachement, et aussi sur que s’il venait à lui arriver quelque chose ça me toucherait, l’inverse serait tout à fait vrai également.

« non, je serais beaucoup trop pourrie en médecin. et puis les études aussi longues, autrement qu'en staps, c'est pas pour moi. » je souriais doucement. « Oh, non je voulais dire surtout pour le côté annonce des nouvelles. » en riant un peu. Les études longues c’était la galère, et ça n’était pas non plus pour moi. « C’est aussi trop long pour moi, c’est certains. Mais en tout cas, ils pourraient apprendre à ne pas tourner autour du pot pour annoncer le choses en tout cas. » dis-je. Je soupirais un peu et réalisais que ma main s’était calmée. Je ne tremblais plus. Peut être que parler de la chose, pouvoir enfin faire sortir verbalement le soucis c’était une bonne chose. Peut être. « Tu veux marcher un peu? » je lui proposais. Peut être qu’elle avait autre chose à faire, elle n’était pas obligée. Mais apparemment, sa présence semblait bénéfique sur moi.