(maleï) | la magie de jade.

il y a de ces jours où tout est compliqué. le réveil, la bouffe, les fringues. de ces jours où on se dit, qu’est-ce qu’on fout ici. dans ce quartier, dans ce studio arrangé, dans cette ville. et bah, ce jour là, c’est aujourd'hui, pour loreleï. loreleï qui se lève après une nuit à faire les fête avec les gars. aujourd'hui, c'est son jour de congé à la boutique. aujourd'hui, elle a pas cours. alors elle avait décidé de dormir. mais c'était sans compter les voisins qui viendraient toquer à la porte de son petit studio. un voisin, en particulier. celui avec le mioche qui gueule tout le temps. enfin, c'est pas vrai, mais loreleï elle dit que le gosse pleure sans arrêt. parce qu'elle se plaint tout le temps, parce qu'elle commence à être une vrai chieuse à la longue, la brune. faut pas hésiter à le dire, nan. loreleï, c'est une chieuse. si elle avait su que c'était ce voisin là, elle aurait pas répondu. elle aurait fait mine de pas être là. mais elle sait pas, parce qu'elle a pas de machin rond pour voir qui y'a derrière la porte, et qu'en plus elle aurait fait du bruit, douée comme elle est. d'ailleurs, elle en fait du bruit. d'abord elle se prend les pieds dans ses chaussures agglutinées devant la porte, ensuite elle manque de se prendre la porte de la salle de bain. non, les lendemains de soirée, pour lo', c'est pas la joie. pourtant, elle a pas le gueule de bois. c'est juste la fatigue, ça se corrige. alors elle va ouvrir, t-shirt xxl emprunté à un des gars- elle sait plus lequel, de toutes manières c'est une crevette face à ces cinq gorilles. et quand elle prend quelque chose, c'est à elle. c'est ça dans la bande, tu prends, c'est à toi, tu reprends... bah c'est à toi-, short qu'on voit à peine sous le t-shirt et sa longue tignasse brune rabattue sur son épaule gauche. elle se frotte les yeux. bâille négligemment. avant de voir son voisin, un certain bleddyn, avec sa fille dans les bras. petite princesse blonde aux grands yeux verts. et y'a pas qu'elle, d'ailleurs, qu'à des grands yeux. lo', elle voit la mioche devant elle, elle reste scotchée. bouche entrouverte, deux grosses billes marrons à la place des yeux. elle met un certain temps, avant de se rendre compte que c'est bien un bébé, à quelques centimètres de sa tête. elle regarde le père de la petite, sans comprendre. elle lui avait déjà parlé, de temps en temps. jamais trop, il était toujours avec la petite. dommage, il était plutôt mignon. elle sait qu'il s'appelle macsen, qu'il vient du pays de galle, et qu'il est cuisinier. qu'il a une fille, aussi, mais après, rien de très précis là dessus. père célibataire, séparé ou ayant perdu sa copine, lo, elle en savait rien et elle s'en tapait. tout ce qui concerne les gosses, lo, elle s'en fout. alors quand il lui demande si elle peut s'occuper de la petite, lui qui a l'air tellement embarrassé, et pressé, lo, elle voit aucune autre réponse que « oui. » et elle se retrouve avec un bébé gazouillant dans les bras, un sac d'affaires pour s'en occuper, et une horaire à la volée, à laquelle il viendrait la récupérer. comme ça. comme si, en un claquement de doigt, son studio allait être rangé. comme si, en un claquement de doigt, son serpent allait être nourrit. comme si en un claquement de doigt, elle allait être réveillée. a bah, en fait, c'est le cas, parce que pour le coup, lo, elle s'est bien réveillée là. elle ferme la porte, elle cligne des yeux, elle regarde la petite, qui pipe pas mot. plutôt calme, en fait. mais attends, qu'est-ce qu'elle faisait là, loreleï ? la baby-sitter ? elle ? sérieusement ? c'est le summum, ça. la surprise du siècle. loreleï qu'avait jamais tenu un gosse dans ses bras, loreleï qui supportait pas ça, loreleï qui s'en plaignait tout le temps. loreleï qu'est même pas bienveillante, putain. elle aurait pu dire non, mais bizarrement, à ce moment là, elle avait craqué devant la mine désolée de son voisin. bah la voilà dans de beaux draps. elle s'avance dans son studio, enjambe les conneries qui traînent et va poser la petite sur une partie du lit, fait. sac à langer à côté. elle croise les bras sous sa poitrine et l'observe. qu'est-ce qu'elle allait faire, maintenant ? quand est-ce qu'il faut la nourrir ? comment on la nourrit ? et la changer ? lo elle sait pas mettre de couches. ni en enlever. lo elle sait pas faire tout ça. lo elle sait à peine s'occuper de son serpent, qui tellement il manquait de bouffe, à gobé le rat. ou peut-être que c'était parce que lo avait qu'une seule cage et qu'elle les a mis tous les deux ensembles... enfin bref. alors lo elle réfléchit. y'avait bien des personnes, dans son entourage, qui savaient s'occuper d'un satané gamin ! et qui pourraient lui expliquer...

allongée sur son lit, la petite jade sur les genoux, loreleï elle joue. un jeu dont elle se souvient, que sa mère lui faisait. un souvenir comme ça, qui est revenu en s'occupant de la petite. elle avait appelé une amie, qui travaillait dans une crèche. le truc bien chiant, quoi. mais maintenant, lo, elle était calée concernant la petite. elle l'avait fait mangée, lui avait changé sa couche, et même que la petite avait dormi, avec une lo inquiète à côté. bah oui, elle a pas de barreaux, sur son lit. alors si la petite était tombée, par un moment inattention... les rires et gazouillis de jade raisonnaient dans le studio. et lo avait tout juste eu assez de temps pour mettre un jogging par dessus son short -cherchez pas- pour se sentir un peu plus habillée. elle s'était lavée les dents, aussi, et avait pu trouver des restes de salade pour se faire une sorte de déjeuner. alors elle parlait à la petite, qui comprenait rien, et parlait d'un anglais haché et modifié façon bébé, que lo comprenait pas non plus, malgré son niveau excellent en anglais. mais c'était pas grave, elles arrivaient à se comprendre, les deux nénettes. et lo souriait à la petite qui lui répondait par d'autres gazouillis. oh, elle avait pleuré. mais pas tant que ça. lo qui était paniquée quelques heures plus tôt à l'idée de s'occuper de la fille bleddyn avait sû trouver à la bercer pour qu'elle s'endorme ou se calme. par contre, elle avait pas chanté, nan. elle avait mis son téléphone et trouvé une jolie berceuse bien chiante mais qui fait pioncer tous les petits de cet âge. on toque à la porte. lo regarde l'heure. ah. sûrement papa bleddyn. qui viendrait un samedi voir loreleï sans la prévenir, de toute manière ? les gars savent bien que lo peut dormir toute une journée après une nuit comme ils ont passé, et ils savent aussi qu'elle peut être de très mauvais poil quand on la réveille. alors elle se lève, portant jade contre ses hanches, lui laissant son index dans ses petites mains toutes douces, car elle jouait avec, et va ouvrir. c'est avec un grand sourire sur les lèvres qu'elle se retrouve pour la deuxième fois de la journée devant son voisin -mignon, parce que y'en a des moins mignons, à cet étage-. la petite le reconnait sans soucis et ne demande qu'une chose : aller dans les bras de son père. alors lo lui rend la petite, tendrement, doucement. « rebonjour, du coup. ça s'est bien passé ? tu semblais pressé ce matin.» qui aurait crû que lo, malgré le réveil brutal qu'elle avait eu, pouvait être aimable, un samedi ?