FAUVETTE(S) + (la princesse et le valeureux chevalier)

• raphaël est fébrile. oui, fébrile, comme tous les mardis, il fait les cinq cents pas devant l'école de sa sœur. il serait avec un ami, il deviendrait insupportable, à trop parler pour ne rien dire. il attend sa sœur, sa princesse, son rayon de soleil. il veut la voir sortir en courant et se jeter dans ses bras, comme elle le fait d'habitude. il aime la tenir contre lui, la serrer doucement, et humer le parfum de ses cheveux. il 'aime de tout son corps, cette petite sœur qu'il a toujours rêvé d'avoir. il veut qu'elle lui raconte de sa voix enjouée chaque détail de sa petite vie. il veut savoir qui est son amoureux du moment, à qui elle a tenu la main pour retourner en classe, à quoi elle a joué pendant la récréation. et puis il sait qu'elle va faire ses devoirs, à côté de lui, pendant qu'il sera en train de dessiner sa petite moue sérieuse et parfaitement adorable. alors, il l'attend, un large sourire sur les lèvres, qui lui fait trois fois le tour du visage. il l'attend.
• la sonnerie retentit et il sursaute. elle est stridente. et il s'était totalement perdu dans ses pensées. alors il se retourne vers le portail en fer, couleur sapin. et se mettant sur la pointe des pieds, il guette les gosses qui courent jusqu'à la sortie, leurs cartables brinquebalant sur leurs dos, ou tentant tant bien que mal de les suivre. il attend que le petit rang, qu'il distingue au fond s'approche. il attend de voir son sourire lumineux, ses yeux bleus s'éclairer en le voyant. c'est peut-être un peu narcissique, mais il aime se sentir privilégié, se sentir unique. et elle le fait d'une manière qu'aucune fille ne pourrait égaler, non. elle le fait avec une grande innocence. c'est sa sœur et elle l'aime comme un modèle.
• il fait de grands pas pour se rapprocher d'elle, puis, après lui avoir retiré son sac à dos beaucoup trop lourd pour elle, et il la prend dans ses bras. il n'est pas très musclé, mais elle n'est pas très épaisse non plus, il faut dire. il s'inquiète parfois qu'elle mange assez, il ne se souvient pas avoir été aussi maigre. il la serre contre lui et entreprend de lui bisouiller le visage, la chatouillant certainement avec ses cheveux, qu'il n'a pas attaché en catogan. comme ça, si elle décide ensuite que les tresses lui vont bien, elle pourra s'amuser sans lui faire mal. elle a ses petits bras passés autour de son cou et il frotte doucement son nez contre le sien, tout rond et tout rose. bisou d'esquimau. « tu as passé une bonne journée, princesse ? »

• il aime voir le sourire émerveillé de sa loulah. il aime voir les étoiles qui illuminent ses yeux quand elle croise le regard de son frère, comme si elle ne s'attendait pas, à chaque fois, à le voir ici. mais c'est le cas. il la prend dans ses bras et la serre contre lui. il tient à elle plus qu'à n'importe qui au monde. elle est la seule et unique femme de sa vie qui compte autant. il ne pourra jamais la laisser. il ne partira pas avant qu'elle le lui demande. et il sait qu'elle ne le fera jamais. il y a des parents qui le regardent d'un air étrange. genre ceux qui ne viennent jamais chercher leurs gosses d'habitude et qui ne le voient pas assez souvent. et ceux qui ne lui ont jamais adressé la parole et qui pensent que loulah est sa fille. peu lui importe ce que pensent les autres. ils peuvent dire qu'elle est sa fille cachée, ça ne le dérange pas. elle lui dit que sa journée a été longue, parce qu'elle l'attendait avec impatience. lui, il a plein de choses à lui raconter. il lui en dit beaucoup. il lui parle comme il parlerait à une grande personne. parce qu'il sait qu'elle est mature pour son âge, et qu'elle n'aime pas qu'on la prenne pour une gamine. il la repose au sol, le sac passé sur une de ses épaules, et la tient par la main, en souriant. « oh. j'ai peint, encore un peu. encore une dame que tu vas trouver un peu trop nue, comme d'habitude. et j'ai des choses à te raconter. a propos de lys. »
• parfois il se dit qu'elle suit sa vie amoureuse comme un feuilleton à la télé. elle s'installe, s'allonge contre lui, la tête posée sur ses genoux, et l'écoute attentivement, commentant parfois ses actions ou ses paroles. il sait qu'elle va le réprimander dès qu'il va commencer à lui dire ce qu'il a fait. il n'en doute pas une seule seconde. parce que si il était à sa place, il en ferait de même. elle n'est pas sa petite sœur pour rien non plus. il ne la fait pas monter dans la voiture. il fait bon, presque chaud. il a retiré sa veste, et bientôt, il sera obligé d'attacher ses beaux cheveux. alors, main dans la main, avec mini-fauvette, comme il l'appelle, il se dirige vers le glacier le plus proche. il sait que la petite aime les glaces, il l'a découvert l'an dernier, pas sûr de lui du tout la première fois qu'il l'avait emmenée. lui, il aime la glace au yaourt. parfum yaourt. pas un truc infâme à base de produits laitiers, non mais oh, vous l'avez pris pour qui ? un petit veau qui sort du ventre de sa mère. il s'arrête un instant et aide la petite à retirer sa veste. il a envie de discuter avec elle, longtemps, aussi longtemps que ce sera nécessaire. jusqu'à ce qu'elle aie envie de faire autre chose. elle peut l'emmener où elle veut. il la suivra. et si elle a envie de faire les boutiques pour s'habiller en princesse ? il achètera tout ce qu'elle voudra. le but du mardi, c'est de faire plaisir à la gamine. c'est pourquoi il n'hésite pas, cette fois-ci, à l'emmener jusqu'au petit commerce, tout sourire et à demander une boule de glace vanille, avant de sourire à sa sœur « à quoi tu la veux ? »

• la gamine a ce petit sourire hésitant et adorable quand elle lui répond, et il ne peut s'empêcher de fondre intérieurement. comme si elle avait toujours peur de demander quoi que ce soit, et avait toujours du mal à accepter le fait que son frère la gâte -peut-être même un peu trop. mais elle était sa princesse après tout.- elle lui donne encore un nouveau parfum et il sourit. il commence à se demander si elle ne veut pas essayer tous les parfums qui existent. faudra qu'il lui demande. il récupère son pot et sa cuillère rouge en plastique transparent, puis le cornet de la gamine, n'obliant pas de payer et de prendre quelques serviettes, des fois que l'un comme l'autre, ils s'en foutent partout. un accident, c'était si vite arrivé... il reprit sa petite main, une minuscule menotte qui se perdait entre ses longs doigts d'artiste et de pianiste. il adore la tenir par la main, comme un gamin tient un ballon, espérant secrètement s'envoler avec. lui, espérait secrètement qu'elle le transporte dans son monde enfantin, qu'il avait parfois un peu de mal à saisir.
• elle lui pose cette question, et il a besoin de réfléchir un instant. bien sûr qu'il sait dessiner et peindre des animaux. mais il est vrai que ça fait longtemps qu'il ne s'y est pas essayé. la dernière fois, c'était pour un devoir. il a un petit rire silencieux et il lâche un instant la main de l'enfant pour manger sa glace. « je sais dessiner des animaux, ouais. j'aime pas trop, c'est pas ce que je préfère, mais je le sais. si tu veux, je te dessinerais kuzco. comme ça, tu pourras le mettre dans ta chambre, et ce sera comme s'il était aussi à la maison chez papa quand tu seras pas chez moi ? » papa est toujours un mot qui lui fait bizarre. parce que longtemps, il ne l'a pas vraiment prononcé. et il sait que c'est plus ou moins la même chose pour sa sœur. de toute manière, elle passe plus de temps avec lui qu'avec leur père, toujours débordé de boulot. mais ça ne dérange pas raph'. parce qu'il aime se dire que sa sœur est aussi un peu sa fille. qu'il est aussi celui qui veille à ce que les devoirs soient bien faits. ils devront d'ailleurs s'y mettre quand ils rentreront. mais les premiers rayons de soleils, il faut en profiter.
• il termine rapidement son pot, et tandis que ses méninges gèlent, lui apportant une migraine terrible, il sort de sa poche son paquet de cigarettes et son briquet. il sait qu'elle n'aime pas le voir fumer, et il sait aussi qu'il fume comme un pompier. mais il ne peut pas s'en passer. c'est comme l'art en fait. il en a besoin, pour s'élever, toujours un peu plus haut, tiré et bercé par la fumée qui s'échappe de ses lèvres. « dis moi ma belle. on reste une petite heure à se balader, et après on rentre. t'en penses quoi ? » il lui sourit doucement, tirant sur sa cigarette, dont le bout rougeoie un instant. « tu veux qu'on fasse un truc en particulier ? je fais ce que tu veux. tant que ça n'implique pas des trucs dangereux. »

• quand il réfléchit, elle ne parle pas. c'est quelque chose qu'il apprécie beaucoup chez elle. elle a souvent des questions, toujours intéressantes, mais lorsqu'il faut laisser les gens en silence, le temps qu'ils trouvent une réponse, elle le fait. elle sait se taire et ce n'est pas le cas de pas mal d'enfants. il était de ceux qui n'arrêtaient pas de causer et qui demandaient pourquoi il n'avait pas de réponse immédiate à sa question. elle regarde son pot et il regarde son cornet et il sourit. il est toujours content d'avoir ce genre de débats, sur ce qui est le mieux. notamment, parce que ça se terminait quasi toujours en chatouilles, et tant pis pour les voisins qui entendaient la petite blonde hurler de rire pour qu'il arrête. ils ont qu'à être moins grincheux. sinon ils seraient réjouis d'entendre quelque chose d'aussi innocent et de pur qu'un rire d'enfant. na. quand il mentionne l'idée de lui dessiner kuzco, une étincelle explose soudainement dans ses yeux rieurs. il est content. il adore la voir le regarder comme ça. il ne s'en lasse pas, vraiment. ça lui apporte toujours une sorte de joie indescriptible. il se souvient de la petite fille silencieuse, qui faisait toujours en sorte de ne pas faire de bruit pour ne déranger personne ; qui gardait ses questions pour elle, ou qui les posait tout bas. alors il était content de la voir exprimer sa joie. il avait lu pas mal de trucs sur les enfants qui avaient été dans le cas de la petite loulah, et ce qu'il avait pu lire lui avait fait peur. des cas de blocage, scolaire, langagier, ou dans les relations sociales. alors, le moindre signe positif, c'était toujours pour lui une sorte de petit miracle, un soulagement immense. elle hoche la tête, et il est presque sûr qu'elle s'est fait mal à la tête. il est content d'avoir trouvé quelque chose qui pourrait lui plaire. et sans même lui demander. elle ne rougit même pas. ça, il en est content. les choses s'améliorent. bientôt, il ne restera plus rien des conséquences négatives de la mère de loulah. enfin, de sa génitrice, il n'est pas vraiment sûr qu'on puisse appeler ça une maman.
• il sort son paquet de cigarettes, et il sent un regard insistant sur lui. alors il jette un œil à sa petite sœur et il n'est même plus surpris de voir son regard désapprobateur, avec ses lèvres plissées et ses sourcils froncés. elle n'a même plus besoin de parler. il trouve ça chou, d'une certaine façon, qu'elle s'inquiète pour lui. qu'elle ne veuille pas qu'il tombe malade à cause de ça. mais il n'a vraiment pas envie d'arrêter. il a des trucs plus importants à stopper d'abord. des trucs bien plus dangereux qu'une cigarette. alors il lève les yeux au ciel, tout en allumant la clope. « je sais, loulah. je le sais. pas la peine de me regarder comme si tu allais me gronder. » il n'est pas en colère, nan. ni déçu ni quoi que ce soit. il y a même un peu d'amusement dans sa voix. il se doute que la petite a peur de le mettre en colère. et quand il y pense, il sent toujours une sorte de petit rayonnement doux, dans son cœur. c'était l'idée qu'il était si important pour elle, qui lui faisait tant de bien. elle était vraiment adorable. alors de sa main libre, après avoir jeté son pot de glace terminé, il passe une main dans ses cheveux clairs. elle n'a pas les siens, mais eu importe. il adore les coiffer le mercredi matin, avant de la ramener chez son père. il sourit un peu et passe son pouce sur sa petite joue rosée. « je t'aime tu sais, mon bébé-loulah ? »
• il lui propose de rester encore une heure, et elle accepte. et puis quand il lui demande si elle a envie de faire, une fois n'est pas coutume, elle remet la décision entre ses mains. il faudra qu'il lui apprenne à arrêter de faire ça un jour. il soupire et regarde un peu autour d'eux. et un large sourire, un peu flippant certes, se dessine sur ses lèvres. il a eu une idée géniale. et il sait à quel point elle va plaire à sa petite sœur. pour ce qui est de son père, comment expliquer que... qu'il s'en balance ? il trouvera bien une excuse à la con, en disant que ce serait bon pour elle, que ça lui ferait un compagnon de jeu, et que ça lui apprendrait à être responsable ? ouais, il lui sortirait un truc dans ce goût là. il finit sa cigarette en quelques bouffées, l'écrase et la jette dans le caniveau avant d'embrasser sa sœur sur le front. « dis moi, je peux te faire confiance ? tu peux m'attendre ici, cinq petites minutes ? j'ai une surprise à aller chercher pour toi, j'avais oublié, j'en ai pour trente secondes. et tu regardes pas. » il ajoute cette dernière phrase avec un petit rire. et il court. il ne court pas longtemps, juste quelques mètres. puis il s'engouffre dans la boutique juste devant lui, après s'être assuré que la gamine ne regardait pas dans sa direction. ses yeux, habitués à observer rapidement, trouvent sur le champ ce qu'il lui faut. il a menti en disant qu'il avait oublié qu'il devait aller la chercher, mais il va quand même revenir avec une surprise. il paye le strict minimum qui va avec sa surprise, promettant de revenir dès que possible chercher ce qui sera accessoire. puis il ressort et profite que l'enfant lui tourne le dos pour marcher jusqu'à elle en faisant le moins de bruit possible. « surpriiiise. » braille-t-il à moitié, pour la faire sursauter. pas de surprise sans surprise. voilà tout.

• elle sourit quand il lui dit qu'il l'aime. il aime sa sœur. elle est tout pour lui. sa lumière, son ange, sa protectrice, son rayon de soleil dans le brouillard. elle est tout ce qui lui lui importe. elle est la seule femme -enfin fille, mais ça n'a pas d'importance- dont le jugement, dont l'avis a une valeur pour lui. ce qu'elle pense de lui est très important. elle le voit comme son chevalier, comme son protecteur, comme son tout. il adore ça. ça ne fait même pas gonfler son ego surdimensionné. c'est l'amour qu'il aime, celui qui le rassure. celui qui lui dit qu'il pourra toujours venir se réfugier dans son monde à elle. elle est sa famille. sa mère et son père passeront toujours au second plan par rapport à loulah. mais il pense que ses parents ont compris. que le bonheur de la petite a plus de valeur que le reste. et qu'il est prêt à tout pour qu'elle soit heureuse. elle lui dit qu'elle l'aime aussi, et il ne peut pas s'empêcher de sourire. il adorait la manière qu'elle avait de prononcer ces petits mots, si purs dans sa petite bouche enfantine. il était content qu'elle soit le premier à qui elle le disait. lui, il était son frère. il était son chevalier. alors les autres auxquels elle le dirait aussi, il les combattra pour ne pas qu'ils se jouent d'elle. il est hors de question qu'un stupide margoulin de bas étage vienne la faire pleurer. et il le sait. il a beau être plutôt calme et pas très costaud, si y en a un qui fait pleurer sa sœur il ira lui casser la gueule. sans même hésiter un seul instant.
• et puis quand il revient, avec la petite boîte en carton entre les mains, avant de la surprendre, il la voit trépigner. regarder les autres avec une impatience non feinte. comme si elle n'en pouvait plus,  qu'elle n'avait qu'une envie, celle de se retourner pour essayer de voir ce qu'il peut bien trafiquer. plus que lui offrir des choses, ce que l'artiste aime, c'est lui faire des surprises, comme ça. ça lui passe par l'esprit, quand ils se baladent, et il le veut absolument. il ne la couvre pas de cadeaux pour l'occuper et qu'elle le laisse tranquille, contrairement à son père. il lui offre plein de cadeaux pour être sûr qu'elle ne manque de rien, qu'elle ne s'ennuie pas quand elle ne vient pas le voir. et puis pour voir ses joues rouges et ses yeux brillants d'étoiles. il aime quand elle se jette dans ses bras ensuite, en le remerciant des tas de fois. il a l'impression d'avoir fait quelque chose de bien. et ce n'est quand même pas négligeable. elle sursaute, crie un peu, puis elle prend le carton. elle hésite à l'ouvrir, et ses yeux ne cessent de faire des allers retours entre la boîte et raph'. il lève les yeux au ciel et fait un petit signe de tête, pour lui faire comprendre qu'elle devait l'ouvrir. alors c'est ce qu'elle fait. elle soulève le couvercle. il y a un petit chat, un siamois. enfin, pas tout à fait. il n'avait pas la tête du siamois. il était croisé. il était minuscule, il tenait dans la paume de la main. il avait été trouvé dans une rue, dans un autre carton. paraît-il qu'il était doux et câlin. il avait une petit cicatrice sur le visage. elle demande le motif de ce cadeau. l'artiste hausse les épaules « c'est genre... comme un dessin de kuzco dans ta chambre, sauf que lui, il va vouloir dormir avec toi, réclamer à manger, te faire des câlins touuuut le temps. on dira à papa que c'est pour t'apprendre à être responsable, t'inquiètes, je trouverais une raison. et puis, si jamais, tu lui feras tes ptits yeux de chaton mouillé, et il te laissera le garder. c'est un mâle. je l'ai appelé scar, mais si tu veux on peut changer, hein. »