meeting (ahava)

encore une nuit qui va s'avérer courte, lointaine et peut-être même pesante. tu marches, tu divagues, tu les croises, ils t'attendent. forcément, tu as ce qu'ils veulent. ils veulent leurs armes, ils veulent des outils beaucoup plus puissants qu'eux et totalement interdit et toi, ton métier c'est qu'ils les aient. évidement, tu ne fais pas dans la charité, ils ont obligation de payer en retour et comme ça toi, tu as de quoi manger le soir. c'est comme ça, c'est dangereux. d'ailleurs, ta main est accrochée à ta poche tout au long de la négociation. la poche où, quelques centimètres plus loin se trouve ton arme à feu. auto-défense, dissuasion, c'est un peu les deux. tu aimerais avoir la main dessus, au cas où, parce que ça peut vite dégénérer, tu peux vite de retrouver au sol, avec une balle dans l'estomac. ça ne serait pas la première fois, pourtant tu as confiance, ce sont des clients réguliers. tu ne veux pas savoir ce qu'ils font avec, surtout pas, c'est leur problème, toi, tu leur fournis, tu te contentes de ça, pas plus. braquage et autres mystères, tu t'en fiches. " le compte est bon, au plaisir de vous recroiser."  la mallette en main, tu disparais dans la nuit noire. tu marches et continues ta route jusqu'à ce que tu sois à bonne distance des types. tu n'as pas peur, tu n'as que rarement peur, mais tu tiens un tant soit peu à ta vie, alors il vaut mieux tracer sa route avant qu'ils ne changent d'avis. tu continues ta route et c'est certainement à ce moment que tu poses pour la première fois tes yeux sur cette douce créature. brune comme la nuit, chétive et fragile à la fois, tu hésites longuement. tu pourrais partir, t'éloigner, et la laisser là, mais il y a ce petit risque qu'ils reviennent les mecs et qu'ils tombent sur elle. ils n'ont pas l'âme la plus pure, mais toi, l'as-tu ? pas tellement, pas certainement, tu es peut-être même pire, seulement, tes pieds sont attirés vers elle, tu marches déjà dans sa direction, bien décidé à la faire bouger d'ici. il faut qu'elle bouge, qu'elle rentre chez elle, il est tard, minuit passé. qu'est-ce qu'elle peut bien faire ici ? et si elle était bien plus dangereuse que l'image qu'elle projette. tu te questionnes pas plus que ça. " excuse- moi, tu as besoin d'aide ? "  c'est étrange comme question, mais tu ne peux pas t'en empêcher. " je demande ça parce qu'il est tard et ce n'est pas forcément une bonne idée de traîner dans la nuit, surtout en pleine rue. peut-être faudrait-il au moins s'éloigner, vers les industries, où l'on risquerait moins de tomber sur tes types louches. " ah moins que ce ne soit toi, le type louche. elle-même jugera.  

pour la cinquième fois, tu te retournes dans ton lit. ton regard s'enfuit vers la fenêtre, vers le ciel, vers les étoiles. elles sont de sorties, ce soir, comme tous les soirs, d'ailleurs, et elles brillent pour toi, ahava. tu rêves de briller aussi fort qu'elles, tu rêves de pouvoir les toucher, d'être à leur niveau, de pouvoir les atteindre. mais tu sais que c'est impossible, t'es pas aussi belle pour être là-haut, t'es pas assez bien. alors tu restes là, à les regarder scintiller, de tout en bas. tes pensées s'évadent vers d'autres cieux, tu penses à ton carnet des héros qui n'a pas été utilisé depuis longtemps. tu l'utilises pour écrire des histoires sur les gens que tu rencontres dans la rue, monsieur et madame tout-le-monde, c'est comme ça qu'on les appelle, mais pour toi, ils deviennent plus que de simples personnes, ça devient tes héros. tu les prends en photo, discrètement, doucement pour pas te faire remarquer et pus tu leur inventes une histoire, une vie, une famille, un caractère et enfin, tu les remercies d'exister. c'est comme ça que tu avances toi, dans la vie, tu t'accroches à tes héros. tu penses à eux, tu te demandes ce qu'ils font à certains moments de la journée, tu leur souhaites du bonheur et tu espères que tout va bien pour eux. toi aussi, ce soir, tu veux sortir, tu veux inventer de nouveaux héros, tu dois aller les trouver, les immortaliser avec l'objectif de ton appareil et puis les faire exister dans ta tête, dans ton carnet, dans ta vie. alors tu sors, sur la pointe des pieds avec ton appareil, ton livre des héros et tu te fonds dans la nuit. t'as marché sans vraiment savoir où aller. en général, tes pas te conduisent vers la mer, mais pas cette nuit. la mer aussi, elle te fascine, peut-être pas autant que les étoiles, mais tu aimes sa façon de venir vers toi puis de se rétracter au dernier moment, t'aimes sa violence les jours de grisaille, t'aimes sa couleur, sa profondeur, son bruit et surtout son odeur. t'aimes la mer, mais ce soir, tes pieds t'ont conduit près du cours d'eau. sur tout le trajet, t'as cherché les traces d'âme pour les photographier et les réinventer, mais t'as rien trouvé. il fait nuit, biarritz dort et les héros aussi, apparemment. la seule chose que tu as trouvée, c'est la constellation d'orion. encore des étoiles, elles ont toujours été là pour toi, toujours dans le ciel, prêtes à te sourire quand tu en as le plus besoin, remplacées par le soleil le jour qui, lui aussi, te sourit. orion, il t'envoie du rêve alors tu penses à un monde où keren rentrerait à la maison, un monde où elle ne se disputerait plus avec tes parents. tu rêves d'un monde où tu n'aurais pas peur, peur de l'avenir, peur de demain, peur de te faire mal. tu veux un monde d'amour, tu ne veux que ça, de l'amour. tu en cherches désespéramment, n'importe qui, n'importe quand. quelqu'un de spécial, quelqu'un de beau à l'intérieur, quelqu'un qui t'aimera aussi fort que tu aimes les étoiles, quelqu'un qui viendra vers toi sans repartir au dernier moment comme la mer. quelqu'un pour toi. tu ne sais pas si c'est orion qui répond à tes appels, mais un héros est arrivé et il s'adresse à toi. alors doucement, tes yeux quittent le ciel pour se poser sur terre, sur ce héros qui te parle et tu souris. bonsoir, que tu dis timidement. je me promenais simplement. tu ne sais pas quoi répondre de plus à ce qu'il vient de te dire à part : ah bon ? des types louches ? je ne savais pas. j'aime beaucoup ce quartier pourtant, c'est beau. on voit bien les étoiles d'ici. et tu relèves les yeux vers la constellation pour illustrer tes dires. et pour remercier orion aussi. merci.

un carnet en main, un appareil photo, et des yeux révoltants. ses iris t'interceptent. t'as pas envie de quitter son regard, tu l'écoutes pourtant, tu l'entends, c'est certain, et tu te permets même de laisser tes pensées divaguer. seulement, le contact se coupe, se perd, et toi t'es là avec ta mallette en main et tes envies de goûter ses lèvres. pourquoi une telle attraction. elle est inexplicable, elle est incontrôlable, tu as du mal à garder tes envies mais elle regarde le ciel. tu te perds, tu fais la même chose, et tes yeux divaguent à leur tour sur ces étoiles que tu n'avais encore jamais remarqué. alors elle est là pour te faire découvrir la vie ? réellement ? non, c'est toi, qui dois l'aider et lui montrer ce que c'est, la vie. " certainement pas tout le temps, des fois ..." que tu dis simplement, alors que t'as qu'une envie. qu'elle te regarde de nouveau. il faut que tu captes son regard, que tu te fasses remarquer et pourtant, tu ne sais pas réellement quoi lui dire, quoi ajouter. " tu aimes les étoiles ? " est-ce que tu dois mentir ? ou simplement avouer que tu n'y connais rien. elle semble tellement absorbée par sa contemplation que tu en es presque jaloux; t'as envie de devenir une étoile en cet instant. tu te creuses les méninges, tu cherches comment faire. " on devrait bouger, si tu veux bien." tu prends les choses en main, tu fais ce que tu veux. ta main passe dans la sienne, et tu l'emportes à ta suite sans même lui demander son avis. " suis-moi " que tu lui souffles simplement, tu ne lui donnes aucune explication supplémentaire. tu avances, tu l'entraînes à ta suite et ce, pendant quelques minutes. après ce laps de temps mais surtout après avoir enfin déguerpis de la route principale, tu ralentis et tu la regardes. tu tentes d'être désolé, mais tu ne l'es pas au fond de toi. t'avais juste besoin qu'elle ne se trouve pas là-bas, que les types qui venaient de t'acheter des armes ne la croise pas, tout simplement parce que tu voulais la garder pour toi, rien que pour toi. est-ce mal ? surement, certainement, parce qu'elle semble si innocente, si prude. tu n'es pas quelqu'un de bien. " des types .. bizarres, désolé, je ne voulais pas qu'il te voit. " tu t'explique, sans trop savoir pourquoi. " tu viens souvent dans l'coin le soir ? tu viens prendre des photos ? " que tu demandes avant de te présenter. " au fait, moi c'est bendo. "