give me that rush - ilaria

Tu soupires longuement en triant des photos sur ton ordinateur. Tu fais toujours ça quand tu es en manque d'inspiration, tu regardes des anciennes photos que tu as faites y a plus ou moins longtemps. Souvent, tu regardes celle qui ne te plait pas pour te rappeler ce qui n'avait pas fonctionné pour toi dans ce cliché et pour essayer de te donner l'idée et l'envie de faire mieux. Mais tu n'arrives à rien aujourd'hui. Ni hier, ni avant-hier d'ailleurs. Ça fait une semaine que tu tournes à vide. Hier tu as passé une bonne partie de ton après-midi de congé à trainer dans la rue et au parc dans le but de tirer discrètement quelques clichés de personnes ou alors de bâtiments en tout genre, histoire de faire revenir l'inspiration. Mais ça n'a pas beaucoup aidé. Tu as besoin de voir autre chose, de changer d'air un peu. Alors, tandis que t'ouvre un énième fichier de clichés que tu appelles les "ratés" tu décides de bouger de ton chez toi. Mais ça t'ennuie d'être seul pour une fois. Pour une fois, car normalement tu es plutôt quelqu'un de solitaire mais là, tu sais que la solitude ne vas pas t'aider à te redonner de l'inspiration. Alors, tu décides d'écrire un sms à une de ces personnes qui t'inspirent beaucoup en général. Ilaria. Tu la prends en photo que depuis très peu de temps, que depuis ça ait un peu clashé avec Coby et toi, mais elle t'inspire tout autant qu'elle. Si ce n'est plus car elle, elle fait du bodypainting en bonus. Et elle est très très trèèès douée. Ce qui diffèrent des photos de Coby c'est que quand tu photographies Aria, elle n'a jamais la même peinture sur le corps. Ça rend chaque session photo très différente et d'autant plus intéressante pour toi. Pas que ça ne le soit pas avec Coby mais c'est différent. Elles sont différentes et elles ont en elles chacune un truc qui t'inspire. Bref ce sont tes muses, tu leurs dois beaucoup, dont l'inspiration et c'est pour ça que tu écris rapidement un message à Aria tout en te préparant. "J'ai le cerveau en bouillie, je n'sors rien de bien en ce moment. Si t'as du temps à perdre, tu viens chercher l'inspiration avec moi au phare ? J't'attends là-bas, viens comme tu es, j'ai surtout envie de prendre l'air. c'est plutôt abstrait comme message, tu espères qu'elle comprendra. Tu n'as pas nécessairement envie de la prendre en photo, quoique, tu ne te déplaces jamais sans ta caméra, mais t'as surtout envie d'aller faire un tour. Si c'est avec elle c'est encore mieux.

Tu aurais pu choisir un jour meilleur pour "aller prendre l'air", aujourd'hui il vente dur et pour une fois, il ne fait pas particulièrement beau et chaud à Biarritz plage. Ca change, t'aime bien ce genre de temps. Ça donne une toute autre ambiance à la ville mais aussi à la mer qui d'habitude plutôt calme est déchainée aujourd'hui. Tu ne voulais pas en faire mais tu ne peux pas t'empêcher de tirer quelque cliché de l'eau qui s'énerve. L'eau et la photographie c'est définitivement vraiment tes passions. Tu n'as pas regardé ton téléphone depuis que tu as envoyé le message à Aria, tu n'es donc pas sûr du tout d'être rejoint par la demoiselle. Tu te gardes un peu la surprises, t'espère qu'elle viendra tout de même. Mais pour le coup tu ne l'attends pas vraiment elle tu te poses sur un rocher près du phare et tu attends plutôt que des idées et de l'inspiration te reviennent.

un emploi comme le tien n'offre aucun jour de congé mais, lorsque le temps est gris comme aujourd'hui et que la partie administrative est bouclée, toi et tes frères vous vous autorisez à prendre un jour de repos.
exercer ce que tu te plaît à appeler ton art te semblait une bonne occupation, après avoir enfilé de vieilles affaires tu t'étais donc placée face à l'immense glace fêlé qui trônait dans ta chambre. après avoir ouvert quelques pots de peintures naturelles et avoir attrapé quelques pinceaux, tu t'assis en tailleur.

face à ton reflet tu gonfles les joues avant de tremper l'un pinceau dans la peinture fraîche. tu le pose ensuite délicatement sur ta joue et laisse ta main vaquer comme elle l'entend sur ta pommette. peu satisfaite du résultat, tu reproduis l'action avec une seconde couleur. puis une troisième. et une quatrième. tu poses le pinceau et un rictus peu convaincu apparaît sur ton visage à présent tâché. c'est banal. c'est déjà vu. tu te lèves énervée de voir la même scène se reproduire pour la troisième fois cette semaine. tu te diriges vers la vieille commode de chêne pratiquement intégralement recouverte d'objet en tout genre de laquelle tu extirpes un morceau de tissu déjà teinté par tes précédents échecs et, alors que tu t'appraites à effacer tout cela, ton téléphone se fait entendre. tu sursaute légèrement et après plusieurs minutes de recherche tu finis par mettre la main dessus.

un message de jakob. tu souris. jakob est un artiste, un vrai. toi tu t'amuses à te dessiner sur le corps mais lui, lui c'est un véritable artiste. il prend des clichés magnifiques et est, lui même une oeuvre d'art. il veut te voir. toi. un sourire plus grand encore se forme sur tes lèvres gercées. tu es flattée qu'il demande après toi et, sans prendre la peine d'achever le nettoyage de ton visage, tu quittes la maison familiale.

le contact du sol froid te fait prendre concience qu'une fois de plus, tu as oublié d'enfiler des chaussures. tant pis. tes ancêtres ont marchés pendant des millénaires sans chaussures tu suis donc leurs pas, sans mauvais jeu de mot.

instinctivement, tu enfonces tes deux écouteurs dans tes oreilles et lance une chanson au hasard. Le rythme est assez calme et, tu ne peux t'empêcher d'esquisser quelques pas de danse. tu es loin d'être douée mais, tu trouves cela amusant. tu tournes comme durant un laps de temps indéfini. peut être quelques minutes ou plus. une chose et sûre, tu finie par arriver au pied du phare.

tu en fait rapidement le tour et fini par aperçevoir jakob assis sur une large pierre. tu souris legerment en t'approchant de lui par l'arrière et tu poses délicatement tes mains sur ses yeux. un léger rire émane de toi alors que tu restes sur ta position.

attendant patiemment la peut-être arrivée d'Ilaria, tu laisses ton regard et ton esprit se perdre dans les vagues. essayant de faire le vide dans ta tête, dans ton esprit, laissant les vagues emporter tous tes moindres tracas de ta vie afin de laisser de nouvelles idées prendre place. on ne peut pas dire que tu en as beaucoup des tracas. tu as ton petit train train quotidien que tu as encore bien du mal à chambouler de temps en temps. tu te sens parfois trop monotone. appliquant trop à lettre l'état d'esprit boulot-métro-dodo. tes journées se ressemblent. ou du moins se ressemblait jusqu'à ce que tu te décides réellement à te lancer dans la photographie. c'est clairement un moyen pour toi de t'évader. de voir le monde autrement. à travers un objectif tout te semble différent. les gens, les objets, les lieux, la vie est différente, tout peut être sublimé comme amoindrit. tout est une question de lumières et de cadrage. tout comme la musique qui est par ailleurs une autre de tes passions. mais cette forme d'art est plus compliqué pour toi, tu l'apprécies tout autant mais c'est différent. un appareil photo te semble n'être qu'une prolongation de toi-même, tu shoot presque comme tu respires. tandis qu'écrire et composer te coûte énormément. mentalement et psychologiquement. car tu ne sais pas écrire des textes sans y mettre tes sentiments, ton coeur, même toutes tes tripes. c'est toujours super éprouvant pour toi et quand tu as fini tu es souvent dans un état larvaire tant tu es vidé. c'est agréable parfois, ça te fait un nouveau défi. ça te brise de ton train-train quotidien. puis tu vis à travers tout ça la photo et la musique alors autant se donner à fond.

c'est totalement perdu dans tes pensées que ta vue est soudainement cachée par de douces mains te faisant sursauter n'ayant rien entendu et étant sérieusement déconnecté. mais il ne te faut qu'un millième de seconde pour reconnaître la personne qui se tient derrière toi. grâce à son rire notamment, mais aussi parce que ça ne peut être personne d'autre qu'elle. « hey, c'est mal de faire peur aux petits vieux, on t'a jamais dit ? » tu souris et lui prends les deux mains, qui sont bien plus chaudes que les tiennes pour une fois, depuis combien de temps es-tu là ? et tu bascules la tête en arrière pour la regarder « comment ça va aujourd'hui ? je ne savais pas trop si tu travaillais et verrais mon message mais je suis content que tu sois là ! » tu lui fais un grand sourire sincère. tu l'apprécies énormément Ilaria. tu crois ne pas trop te tromper en disant qu'elle et toi vous êtes réellement connecté. de part votre art, des oeuvres que vous faites ensemble mais aussi d'esprit. vous vous ressemblez en de beaucoup de points.