it isn't ok and i know it (oltie)

Tu regardes le médecin dans le blanc des yeux, comme tu la toujours fais. Et tu as l’impression de voir la mort, dans ses iris. Il va t’annoncer une mauvaise nouvelle, tu le sais, tu le sens. Et tu ne veux pas que ton frère entende ce que cet homme doit de dire. Il ne le supportera pas, et tu ne veux pas le blesser davantage. Mais lui, il ne semble pas vouloir bouger d’un poil. Tu le sers contre toi, tu le regardes. Le médecin, lui aussi, semble réticent. Il sait que tu n’aimes informer tes proches de ta maladies Il faut dire que ce médecin de suit depuis l’accident de voiture. Tu te mords les lèvres. « Monsieur Roy… » Il coupe le médecin et te regarde maintenant avec ces yeux…auxquels tu n’as jamais pu dire non. Tu inspires, longuement, et tu fais signes au médecin qu’il peut parler. « Bien…Nous avons les résultats de vos prises de sang. La maladie semble se propager, si nous avions la chance de voir le cancer en lui-même rester au niveau de la poitrine, les prochains jours risquent de changer la donne. Et vous savez, nous vous l’avons déjà dit, que si le cancer se généralise, ce qui va malheureusement arrivé, nous ne pourrons plus rien faire pour vous. » Tu fermes les yeux, si fort que tu vois les étoiles. Merde, merde merde merde. Tu t’y attendais, évidement, mais ça fait mal malgré tout. Tu sers la main de ton frère et tu ravales tes larmes, tu dois être forte, pour lui. Alors tu ouvres les yeux, et tu fais face au médecin, à la mort. « Bien…J’aimerais, si possible, ne pas rester ici, pour les dernières semaines. Vous m’aviez dit qu’il était possible d’aménager ma maison, avec un lit médicalisé. Est-ce toujours d’actualité ? »

Mattie finit par accepté que tu restes, tu ne te sens pas pour autant soulager. Car si tu as bien appris quelque chose des hôpitaux c'est que quand le médecin arrive avec une mine si grise c'est que ce n'est pas pour annoncer de bonnes nouvelles généralement. Tu écoutes attentivement, sans rien dire et surtout sans réagir. Tu as l'impression de te recevoir un coup de masse quand le médecin place le pronostique mais tu camoufles tes sentiments, t'essaies d'être fort pour Mattie. Pour une fois. Tu craqueras plus tard. Tu regardes ta soeur, les yeux fermés qui te serre incroyablement fort la main mais tu ne dis toujours rien. Tout va trop vite pour toi, tu ne comprends pas tout, on ne t'a pas tout expliquer non plus il faut dire et tu t'y connais vraiment pas beaucoup en médecin. Mais ce que tu sais, c'est qu'un cancer du sein c'est traitable même curable. Une opération, puis de la chimio et les rayons... un truc du genre non ? Pourquoi Mattie ne fait-elle donc pas ça alors ? Tu parles avant que le médecin ne réponde à ta soeur « A-attendez... vous pouvez pas juste dire ça comme ça et la laisser partir j'veux dire... il n'y a rien à faire ? Une opération, de la chimiothérapie tout ça ? » tu as vaguement souvenir de la mère d'une de tes amies qui avait fait ce traitement là... alors pourquoi pas Mattie ?

Spoiler:

Tu as l’impression de mourir de mille façons différentes. Tu as l’impression de flotter dans le néant, les paroles du médecin font échos en toi. Tu viens de retrouver ton petit frère, mais tu vas le quitter, comme tu vas quitter cette vie que tu aimes tant. Tu vas tout perdre, si rapidement. Tu pensais avoir encore un an, au moins. Mais non, tes jours sont comptés et tu pourrais mourir, là, tout de suite, alors que ton frère te sert contre lui. Que se passerait-il si tu mourrais dans les bras d’Oli, tu ne préfères même pas y penser, parce que tu lui as déjà fait tant de mal…Tu ne veux plus ouvrir les yeux, parce que ça rendrait la chose trop réel. Le médecin est mal à l’aise, lui. Y’a Oli qui prends la parole, et tu ne le regardes toujours pas, tu nages toujours en plein désespoir. Tu souris avec amertume. Il pense encore pouvoir te sauver, mais c’est trop tard. La chimio n’a pas fonctionné, sur toi, et l’opération, et bien tu as bien trop de chance de ne pas survivre. Et tu ne veux pas mourir sur le billard. Alors tu ouvres les yeux, et tu ne laisses pas le médecin parler, tu le regardes fixement cependant, tu le défis de te contredire. « Non Oli, c’est trop tard, mon cancer est trop agressif ça n’a pas marché sur moi. Je, c’est trop tard, il faut que tu l’acceptes, moi je l’ai accepté. » Tu sers toujours sa main, doucement cette fois ci, comme pour le réconforter.

Mattie ne peut pas mourir. Tu n'arrives pas à l'accepter. Il y a forcément quelque chose à faire, n'importe quoi. Tu refuses de simplement la laisser mourir. Mais ils sont clairs tous les deux. Mattie va mourir, elle va te laisser pour de vraie cette fois. Et t'as l'impression de revenir il y a peu de temps en arrière quand on t'a annoncé que ta soeur était morte. T'as rien dit, à peine réagit sur le moment. Tout est venu plus tard, quand tu étais seul, un véritable ouragan de douleur et de tristesse. Malgré le soutien de ta soeur qui te serre la main tu te sens dans le même d'état à la différence que cette fois-ci tes mains tremblent. T'es en manque. Mais pas le petit manque, non. Le manque qui dit, "t'as vraiment besoin de te noyer dans tes cachets mon vieux c'est le moment de dire au revoir et d'aller te planquer dans un coin histoire de te droguer". Tu ne regardes ni le médecin ni Mattie tandis que tu lèves du lit. Cette dernière saurait immédiatement que ça ne va pas et que tu t'apprêtes à faire une connerie. Tu cherches un truc bien à sortir mais tu ne sais pas quoi dire, rien te semble convenir alors tu n'y vas pas par quatre chemins « Je... je dois y aller... j'ai oublié un... je reviendrais, ok ?... je... » t'es à peine cohérent mais tu dois vraiment sortir, ton esprit est obnubilé par le manque, l'envie d'oublier.

Tu le connais bien, ton frère, et le lien entre jumeau, chez toi, il existe bel et bien. Alors oui, même s’il essaie de ne pas te le montrer, tu vois bien qu’il n’est pas bien, qu’il a la tête qui tourne, qu’il est malheureux. Et tu l’es aussi, parce que bon, tu n’as pas envie de mourir, Mattie, tu n’as pas envie de quitter ce monde dont tu ne connais rien, de quitter ces gens si important pour toi. Tu le regardes, avec les yeux tout embués. Il ne dit rien, mais il tremble, Oli. Tu aimerais serrer un peu plus sa main, mais c’est impossible, parce que déjà, tu la serres dans la tienne. T’as toujours été comme ça, Mattie, tu t’inquiètes pour ton frère, et aujourd’hui, alors que c’est toi, dans ce lit d’hôpital, qui attends la mort, tu trouves encore la force de t’inquiéter pour ton frère, ton précieux petit frère, l’amour de ta vie, la deuxième partie de ton âme. Ton petit Olivier, si petit, si mignon, qui a toujours eu besoin de toi pour le rassurer, mais qui devra bientôt subsister seul. Tu sursautes, quand enfin, il prend la parole. Il part, qu’il te dit. Sa voix tremble, il cherche ses mots, se mord la lèvre. Quelque chose ne va pas, tu le vois, tu le sens, et ça t’inquiète. Ça t’inquiète tellement. « Oli…S’il te plait, ne fait pas de bêtises…J’ai besoin de toi… »

Ton cerveau est littéralement concentré que sur une seule chose. Tes cachets encore et encore. Mais il n'y a pas que lui, tout ton corps hurle son manque, t'en tremble même. Tu as besoin d'oublier. D'oublier que tu es tout seul à nouveau. Plus de Mattie, plus de Suliac, tout seul avec pour seule compagnie l'oxy qui ne veut décidément pas te lâcher. Tu ne peux que secouer la tête quand Mattie te dit qu'elle a besoin de toi. « T'as pas besoin de moi Mattie... on a besoin de personne pour crever. On nait seul et meurt seul et on laisse les gens qu'on aime seul aussi quand on crève... on est seul, tout le temps, seul... on est seul toute notre vie... même à notre naissance on était seul, moi d'abord, toi après, pis toi qui meurt soit disant et moi tout seul... t'as pas besoin de moi pour être seule Mattie... personne n'a vraiment besoin de quelqu'un de seul... » tu ne te savais pas si "philosophique" mais t'es apeuré par toutes les conneries que tu viens de débiter en si peu de temps, tu dérailles complètement. Tu regardes d'un air inquiet le médecin qui est toujours là dans la pièce. « Désolé... au... au revoir Docteur... » et tu tournes les talons lâchant brusquement la main de ta soeur. Tu fuis. Tu fuis cette chambre, tu fuis ta soeur mais tu fuis surtout la peur de la mort, la peur de la solitude que tu ne peux pas maîtriser à cause de la mort. Tu fuis la peur pour tes cachets bien plus réconfortant et idyllique.