noé | chanson vers l'inconnu - DEFI

loreleï était bourrée. et quand le brune est bourrée, ça peut aller loin. un exemple ? elle fait -presque- tout ce qu'on peut lui demander, ou plutôt, tous les défis qu'on lui propose, elle les fait, sans réfléchir. lo', c'est une bonne vivante, elle aime ça, boire. ce soir, elle avait fait un concours de celui qui se fera le plus de shots en une minute, et elle avait gagné. mais les gars l'ont laissé gagner, parce que lo' n'aime pas perdre, et elle était déjà bien éméchée, alors pour ne pas lui foutre la pression ou lui donner envie de boire plus, ils avaient ralentis, et loreleï ne s'était pas sentie en danger. elle s'est pas sentie menacée, mais ça l'a pas empêchée de bien boire, et d'en prendre un peu plus de cinq. heureusement qu'aaron avait demandé au barman de mettre moins d'alcool que la normal, sinon elle aurait fait un coma éthylique, ils en étaient sûrs. elle est comme ça, lo'. parfois elle a envie de boire, elle a envie d'oublier sa vie, le temps d'une soirée. aujourd'hui, c'est parce qu'elle a repensée à son frère. son petit frère, celui qui a été durant plus de quinze ans celui qu'elle aimait le plus au monde. plus qu'aaron, plus que ses parents. puis il lui en a voulu, et même si elle le nie, tout au fond d'elle, elle se dit qu'il a raison, et que c'est de sa faute si leur famille n'est plus ce qu'elle était. et parfois ça remonte à la surface, et parfois elle décide de l'oublier et de le noyer de nouveau. loreleï, elle fume pas, non. alors elle boit. tout ça pour dire qu'elle était ivre. bien ivre. pas au point d'en vomir ses tripes, parce qu'aaron l'avait arrêté à temps, mais au point d'avoir un mal de crâne insupportable tout le lendemain, et avoir besoin de somnifère pour ne pas se traîner par terre pour faire quoi que ce soit. lo', elle était aussi bourrée que les gars, peut-être même un peu plus. alors eux aussi, ils faisaient des conneries, et ils continuent, avec leur défis. ce soir, ils ont dit que ce serait les défis d'actions, pas les défis de séduction. de toutes manières, loreleï elle participe pas à leurs jeux de drague, elle aime pas ça. elle fait que les conneries, parfois. mais justes les idioties pas dangereuses. sauf que ce soir, c'est pas un défi dangereux qu'ils lui proposent. aujourd'hui c'est pas de continuer à boire. aujourd'hui, ils lui disent d'aller sous la fenêtre de quelqu'un à milady et de commencer à chanter. de lui chanter une chanson d'amour, de lui faire la sérénade. sauf que lo', elle sait pas c'est quoi, une sérénade. enfin si, mais elle en connait aucune. ça l’intéresse pas, et puis, même si elle en connaissait une... elle pourrait pas s'en souvenir, ah ça non. mais elle accepte, parce qu'elle peut pas refuser un défi, surtout pas ce soir, parce que l'alcool parle pour elle, et que l'alcool ne veut rien refuser. alors elle le fait, et c'est l'un des gars qui va l'accompagner pour filmer ça. comme un témoin. et aussi pour être sûr qu'elle rentre bien chez elle, sans accroc. alors après le bar, ils y vont. à pied, parce que c'est pas loin, et puis aussi, parce qu'ils sont tout de même un minimum raisonnables. puis, t'manière, ils sont venus en taxi, alors bon.
ce qui est sûr, c'est qu'ils sont allés à milady, comme prévu. et loreleï à fait un choix. oh, pas un choix très poussé, non, de toutes manières, elle est pas assez sobre pour réfléchir bien longtemps. alors elle prend la première maison qu'elle voit dans la rue dans laquelle ils arrivent. par chance -ou pas, d'ailleurs-, elle est allumée, malgré l'heure tardive. un couche tard, ou peut-être un lève tôt, on sait pas vraiment, et lo' pense qu'elle ne saura jamais. alors elle commence, sur un air entièrement improvisé, et avec des paroles qui, sans aucun doute, ne veulent rien dire. mais loreleï et la musique, loreleï et les textes, c’est pas l’amour fou. « oui il fait nuit,
mais c’est cette chanson que je te…uh… dédit.
parce que tu hantes mon esprit
et… uh… » elle jette un coup d’œil au coin dans lequel est caché son ami, le téléphone en main. elle a pas d’idée, lo’, elle trouve pas de rimes, lo’. mais elle continue, parce qu’elle veut pas perdre ce défi. « même si atteinte d’un déficit je suis,
je ne vais pas commettre de délit… » elle se tourne vers son ami, en l’interrogeant du regard, le visage décomposé. elle ne sait plus quoi dire, elle sait déjà que ça n’a plus aucun sens, mais l’alcool, encore une fois, fait sortir tous les mots qui pourraient suivre. lui, il répond simplement d’un pouce en l’air, trop absorbé par la vidéo qu’il filme que par la réelle interrogation de la brune. « aller viens dans ma p’tite audi. » le ton de sa voix baisse, une pointe interrogative, elle grimace. c’était la seule rime qu’elle avait trouvée, et tant pis pour le reste.

• noé, t'es fatigué, tu devrais aller te coucher, au lieu de lutter pour garder les yeux ouverts. t'es plus en état de réviser quoi que ce soit. ce que tu fais, ça sert à rien, tu vas juste t'embrouiller l'esprit. tu ferais mieux d'aller dormir. allez, noé. tu sais très bien que de toute façon, si tu continues comme ça, tu vas t'étaler et t'endormir comme un chaton, en trente secondes, sans même t'en rendre compte. allez, bouge toi. tu ranges tes fiches. tu vérifies qu'elle soient bien disposées, comme tu aimes. tu jettes un œil au poisson rouge, dans son pichet, en face de toi. il te regarde d'un air vide, mais l'oeil bovin que tu lui rends n'est pas mieux. tu passes tes main sur ton visage. t'entends un peu de bruit dehors. certainement les autres jeunes qui rentrent de soirée. ah, tiens. tu vas avoir l'air frais demain. autant que ceux qui se sont pris une cuite. il est à peu près cinq heures du matin. il va falloir une grue pour te lever de ton plumard encore. faut que t'arrêtes de faire des quasi-nuits blanches. ça ne te réussit pas à chaque fois, et tu le sais très bien. mais tu ne peux pas t'en empêcher, hein ? tu ne fais jamais attention à l'heure. tu ne regardes jamais la pendule de la cuisine. oui, bah c'est sûr, maintenant que tu le fais, ça te fait un choc. t'as même pas pris de café en plus aujourd'hui. mais t'as fait une sieste avant le dîner, ça doit être ça. tu t'apprêtes à tout remballer, quand tu entends des gloussements. puis quelqu'un qui chante à la fenêtre, que t'avais laissée entrouverte parce qui faisait chaud. tu t'approches, les sourcils froncés, et clairement l'air d'un chaton qui vient de se faire lécher la figure par sa mère. « je suis pas sûr que tu sois en état de conduire. ni que ce soit une heure raisonnable pour un road trip. » que tu réponds, naïvement, sans comprendre pourquoi elle te proposait de monter dans son audi. voiture que tu ne voyais nul part. un peu plus loin, un jeune homme la filmait, mort de rire. ça devait être un défi stupide, un truc du genre. mais ça t'avais réveillé. « t'as un peu trop bu je crois. », tu rajoutes avec un petit sourire. « t'es sûr que ça va aller ? parce que ton ami a pas l'air d'être dans un meilleur état. j'aimerais pas que vous ayez un accident si jamais vous prenez votre audi. vous voulez pas que je vous appelle un taxi plutôt ? »

c'est un gosse qu'est apparu à la fenêtre. enfin, un gosse... plus jeune que loreleï et son pote, quoi. elle l'avait déjà vu. à la fac, sûrement. mais elle avait trop bu pour réfléchir sans que ça lui fasse un mal de crâne presque insoutenable. mais son visage, ou ce qu'elle réussissait à voir de là et vu son état, ça lui brûlait la langue. alors elle fit craquer ses mains, ses doigts, parce que ça la frustrait. les sourcils froncés, elle cherchait le bon angle pour voir son visage le plus clairement possible. mais déjà il faisait sombre, et en plus, elle avait bu, alors pour voir nettement, on allait repasser, hein lo ? « je suis pas sûr que tu sois en état de conduire. ni que ce soit une heure raisonnable pour un road trip. » ton pote pouffe derrière son buisson, mais visiblement, il avait été cramé par le p'tit. et puis, pourquoi il riait, d'abord ? c'était pas drôle, si ? bon, d'accord, le gosse avait pas compris la sérénade comme ils l'auraient voulus. mais c'était mieux ça pour lo plutôt qu'elle soit tombée sur un mec clairement en manque de sexe, on a envie de dire. « t'as un peu trop bu je crois. » ah, il croit ? non, non, pas du tout non. c'est son état normal à l'imbécile. et à lui aussi. en fait, à toute la bande, c'est leur état normal. d'être des p'tits cons qui aiment foutre le bordel partout où ils vont. mais lo elle le trouvait adorable le p'tit gars. il faisait gaffe, il semblait pas vexé, ou en colère. juste un peu naïf, un peu enfant, mais vraiment, elle le trouvait adorable. alors quand il lui sourit, elle sourit aussi, détendant ses traits, abandonnant l'idée de trouver qui c'était. de toutes manières, demain, elle aura oublié tout ça. ou son visage, en tout cas. alors pour le retrouver, c'était raté aussi. « t'es sûr que ça va aller ? parce que ton ami a pas l'air d'être dans un meilleur état. j'aimerais pas que vous ayez un accident si jamais vous prenez votre audi. vous voulez pas que je vous appelle un taxi plutôt ? » oui, adorable. son pote continue de se taper son délire tout seul, par terre. lui, quand il est bourré, c'est du sérieux. limite on dirait un chien qui se roule par terre. lo elle était même pas sûre qu'il filme encore. à coup sûr, il pouvait avoir verrouillé le téléphone. alors elle le regarde quelques instants, blasée, avant de se retourner vers l'étudiant. « il va être dur à traîner, et trop lourd à porter... c'est quoi, les numéros des taxi, teuplait ? » elle finit en sortant son téléphone. sauf que la conne elle se souvient plus de son code pour déverrouiller. merde. elle reste là, les pouces en suspend sur l'écran, la bouche entrouverte, bloquée. puis elle se mord la lèvre. on repassera aussi pour réussir à se débrouiller seuls pour rentrer. « en fait... tu peux... appeler, pour moi, teuplait ? j't'embête plus, après. promis. puis, lui non plus. c'est con c'que j'ai fait. j'suis désolée que ça soit tombé sur toi, t'as l'air cool, puis t'es mignon. t'as une copine ? un copain ? ou t'es célibataire ? puis, tu fais quoi comme études ? j'suis sûre de t'avoir vu à la fac, mais genre, grave sûre. sauf que je vois pas où j't'ai vu. tu serais pas un prof ? de nos jours, les profs, sont sexy et jeunes, alors ça se peut. puis, tu peux faire plus jeune physiquement que ton âge. y'en a pleins, aussi. » elle parle beaucoup lo. elle dit des bêtises lo. mais elle est bourrée, alors bon. elle parle plus que d'habitude, elle réfléchit moins que d'habitude, mais elle laisse tout passer, sans filtre, comme d'habitude.

• elle te demande si tu peux lui rappeler le numéro des taxis. mais tu vois bien qu'elle a du mal à déverrouiller son téléphone, et elle finit par te demander de le faire toi. tu es en train de vérifier que tu as deux chaussures à tes pieds -tant pis si elles sont dépareillées, de toute manière, ça ne te changera pas tellement de d'habitude, et un pantalon. un tshirt, oui, t'es sûr, parce que tu le sens sur ton dos. t'es crevé, c'est pas ta faute, t'as pas envie de sortir en boxer, quand même. elle te pose toute une flopée de questions, et tu souris, avant de descendre la rejoindre dans la rue. ton téléphone à la main, c'est presque étonnant que tu y a ies pensé. j'aurais jamais cru que tu le ferais, étant donné que tu t'es senti obligé de vérifier si tu avais bien un pantalon. tu la fais s'asseoir, t'as pas envie qu'elle tombe ou quoi, tu arriverais pas à la rattraper. pas qu'elle soit lourde ou quoi, c'est une brindille, mis t'as aucune force. genre... pas du tout. t'es sûr qu'elle peut te soulever cette fille, tellement t'es fin et pas musclé. tu t'assieds à ses côtés et tu jettes un œil à son pote, écroulé de rire. au moins, il ne tombera pas lus bas. c'est cool, quand même, d'avoir l'alcool joyeux. il pourrait être en larmes, et dans ce cas là, il faudrait le consoler, et qu'est-ce que c'était ennuyeux ce genre de personnes... tu appelles le taxi. « bonjour, excusez-moi, je suis à milady, j'aimerais que vous rameniez deux de mes amis, qui sont dans un état d'ébriété plutôt avancé. » tu n'as plus qu'à attendre le taxi avec elle, maintenant.
• ça tombe bien, elle t'a posé plein de questions, auxquelles tu as envie de répondre, parce que tu es un incroyable bavard, malgré tes airs d'intello geek coincé. parler, pour toi, c'est une seconde nature. alors tu essaies de te souvenir de toute sa tirade « jsuis pas mignon, t'es juste saoule. et oui, je suis célibataire, m'enfin. c'est pas genre un choix, ou quoi, je pense que ça fait partie de moi. j'ai jamais eu de copain, ni de copine. en fait je suis jamais tombé vraiment amoureux de qui que ce soit, jusqu'à il n'y a pas très longtemps. et ouais, je suis à la fac de physique. j'veux devenir prof, justement, mais fait encore que je bosse avant de pouvoir l'être. » tu souris et tu hausses un peu les épaules. tu aimes les gosses, noé. tu veux leur apprendre tout ça, tu veux leur transmettre ta passion, tu veux les voir, les yeux brillants de curiosité, lever la main pour que tu leur expliques quelque chose. tu veux qu'à la fin des cours ils viennent te poser des questions étranges et hors programme, parce que dans un film, ils parlaient de bobines tesla, et 'j'aimerais bien voir ce que c'est et je me disais que vous sauriez peut-être.' tu as envie d'entendre dire que tu es un de leurs meilleurs profs. tu te dirigerais plus vers le collège que vers le lycée du coup. le lycée, ils sont déjà trop grands, trop matures, ou au contraire pas assez. ou trop blasés. pas assez gamins, en fait. tu as une idée très précise et un peu erronée de l'enseignement. un peu idéalisée. mais tu sais que de toute manière, c'est ça que tu veux faire, et pas autre chose. et tu le sais depuis que tu as douze ans. à l'époque tu ne savais juste pas dans quelle manière. puis tu as découvert la physique-chimie, et ça a été le coup de foudre absolu. « et toi ? t'as un copain ? un amoureux ? ou tu fais juste tu-sais-quoi avec des gens que tu connais plus ou moins bien ? » tu es incapable de dire le mot 'coucher' dans le sens de faire l'amour. tu es un véritable gamin, et les gens ne pourront jamais te prendre au sérieux si tu ne changes pas ça. mais c'est plus fort que toi.

il est réactif le petiot. enfin, réactif même s'il reluquais ses chaussures, elle sait pas pourquoi lo. de toutes manières, elle est trop absorbée par toutes les questions qu'elle lui pose sans réfléchir. oui, réactif parce qu'il appelle quand même suffisamment vite un taxi. et lo elle l'entend parler, de là où elle est. il est cool lui. pourtant elle, elle a pas été cool. il est cool parce qu'il dit que lo et son pote sont ses amis. bon, il va pas dire "yo gros, j'ai des gens là, j'les connais pas, ils ont besoin d'un taxi vite fait."... bon, en fait si, elle, elle l'aurait dit lo'. puis, là, lo, elle aurait pensé que le p'tit gars mignon serait parti, qu'il les aurait laissé attendre mais non. il part, oui, d'ailleurs elle se retourne, ayant comprit qu'il partait. mais pas qu'il viendrait, et qu'il l'aurait rejoint dans la rue. elle sursaute quand il répond, surprise. « jsuis pas mignon, t'es juste saoule. et oui, je suis célibataire, m'enfin. c'est pas genre un choix, ou quoi, je pense que ça fait partie de moi. j'ai jamais eu de copain, ni de copine. en fait je suis jamais tombé vraiment amoureux de qui que ce soit, jusqu'à il n'y a pas très longtemps. et ouais, je suis à la fac de physique. j'veux devenir prof, justement, mais fait encore que je bosse avant de pouvoir l'être. » si-si, il est mignon. et il est poli, parce qu'il répond à toutes les question pas subtiles et totalement impersonnelles de loreleï. et, en plus, il se souvient de tout ce qu'elle lui avait demandé. enfin, si elle se souvient elle-même bien de tout ce qu'elle avait demandé, en fait. alors comme ça le mignon petit gars était jamais tombé amoureux ? et il avait jamais eu quelqu'un ? alors lo, elle peut pas s'empêcher d'essayer de lui demander ou pas s'il est puceau. sauf qu'il parle, avant qu'elle ne puisse poser sa question. elle avait trouvé adversaire à sa taille, niveau parlotte, la brune. « et toi ? t'as un copain ? un amoureux ? ou tu fais juste tu-sais-quoi avec des gens que tu connais plus ou moins bien ? » elle bug, lo. elle comprend pas tout de suite, c'est quoi le "tu-sais-quoi". parce que non, elle sait pas. et puis, quand elle comprend, elle éclate de rire. un rire qui montre vraiment qu'elle est bourrée. un rire bien dégueulasse, comme il faut pas. alors quand elle s'en rend compte, elle met ses mains devant sa bouche comme pour s'empêcher de rigoler, les yeux ronds. « j'ai jamais eu de vrai copain non plus. mais ouais, je fais beaucoup tu-sais-quoi avec des inconnus que je connais pas bien. » elle lui fait un clin d'oeil, pour montrer qu'elle est dans la confidence, même si elle sait pas trop pourquoi le petit-mignon a dit "tu-sais-quoi" au lieu de "coucher". peut-être parce qu'il a pas envie qu'on l'entende ? alors, elle aurait dû chuchoter, lo ? mais pourquoi lui il a pas chuchoté ? lo elle se pose des questions, et ça lui donne mal au crâne. alors elle arrête. « hey, petit-mignon, t'as déjà fait tu-sais-quoi ? » elle fait une pause, avant de se rapprocher et de murmurer vraiment pas discrètement. « fin, t'es puceau ou bien tu l'es plus ? »

• tu vois bien qu'elle sait pas quoi, justement la brune. si tu étais plus clair, moins prude et innocent, les gens te suivraient plus facilement, noé. mais t'aimes ps rougir, tu trouves que tu ressembles juste à une tomate trop mûre, et tu te sens ridicule, alors tu préfères faire des détours comme ça, c'est plus simple pour toi. ou alors tu évites d'en parler. mais tu es trop crevé pour réfléchir avant d'ouvrir ta jolie petite bouche, alors voilà. tu perds le gens. mais on dirait qu'elle capte. et elle te dit qu'elle le fait avec des inconnus ou des gens qu'elle connaît pas bien. et ça, c'est un truc que tu as du mal à comprendre. on peut pas dire que tu es un grand romantique, c'est pas vraiment ça. mais t'as du mal à imaginer qu'on puisse coucher juste comme ça, parce qu'on trouve la personne attrayante. t'as pas vraiment du mal à faire confiance, mais, par exemple, tu ne fais de câlins qu'à des gens que tu connais vraiment et en qui tu as confiance. alors quelque chose d'aussi intime ? ce sera forcément avec quelqu'un que tu aimes. en qui tu as totalement confiance. elle t'appelle petit-mignon, et tu sais pas pourquoi, mais ça te fait rire. c'est chou. on te dit pas souvent que t'es mignon, et on en fait encore moins un surnom. elle te demande si tu as fait tu-sais-quoi, alors tu baisses les yeux et tu te tords nerveusement les mains. et puis, elle te repose la question, plus clairement, sur un ton qui essayait certainement d'être un murmure. et là, c'est obligé, tu deviens rouge comme une tomate, et tu te frotte la nuque, gêné. « … ouais. j'ai jamais c-c-c... » non, tu n'y arrives décidément pas. il va falloir que ça change si tu veux que quelqu'un s'intéresse à toi un jour. quelqu'un comme un garçon, plus grand que toi, plus âgé aussi, blond foncé ou châtain clair, les yeux bleus, des petites étoiles tatouées dans le cou. enfin, c'est une description comme ça, je parle de personne en particulier, hein, évidemment. « j'ai jamais le mot-en-c avec qui que ce soit. » tu le dis très rapidement, parce que c'est un truc dont tu as un peu honte. pas que tu veuilles presser les choses, non, mais tu as l'impression que ce n'est pas normal. comme le fait que tu ne saches absolument pas si tu aimes les filles, les garçons, ou bien les deux.

elle a l'impression qu'il est un peu gêné, le petit-mignon, comme elle l’appelle, maintenant. elle comprend pas la gêne, lo. elle a jamais comprit c'était quoi, exactement. elle a jamais été gênée. ou alors, très rarement. parce qu'au final, elle essaye d'assumer tout ce qu'elle fait. comme le coup de l'audi, par exemple. nan mais attendez, elle a même pas son permis, qu'est-ce qu'elle irait foutre avec une audi ? et puis, là, elle se rend pas trop compte de la gêne, avec la quantité d'alcool qu'elle a ingérée. pourtant, elle le trouve mignon, la peau du visage rouge comme une tomate, les yeux qui cherchent un peu partout où se planquer et sa main qui passe derrière sa nuque. « … ouais. j'ai jamais c-c-c... » elle incline la tête sur le côté, elle lui sourit, pour qu'il continue, pour qu'il y arrive. mais visiblement, c'est pas son fort de dire le mot qu'il faut. lo, lle pourrait le crier sur tous les toits. comme tous les synonymes de ce terme, d'ailleurs. baiser, forniquer, et d'autres mots un peu plus vulgaires qu'elle dirait même devant des gosses, mais dont elle a sérieusement la flemme de se rappeler, là, maintenant, tout de suite. ou alors c'est moi qui ait la flemme, faut voir. mais lo, elle est particulière, alors elle comprend aussi que certaines personnes soient plus réservées, comme petit-mignon-tomate. ouais, tomate est rajouté, vu comment il est tout rouge. elle rit un peu à sa pensée. ouais, aga, c'est bien, rigoles, toi tu vas bien dormir cette nuit. pf, un cas cette nana, quand elle est bourrée, n'empêche. demain elle va bien dégueuler et elle va bien oublier tout ça. et encore, elle s'est pas foutue à poil, imaginez un peu le carnage. et elle en aurait été capable. ah tiens, c'est une idée ça, pour un prochain défi : se foutre à poil ou en sous-vêtement et chanter la sérénade à un inconnu dans un quartier. faut faire gaffe à ce qu'ils appellent pas les flics pour atteinte à la pudeur, cependant. « j'ai jamais le mot-en-c avec qui que ce soit. » elle sourit par cette phrase. elle ouvre la bouche, pour répondre, mais les phares d'une voiture lui font mal aux yeux. alors elle cache son regard, les yeux plissés, et la voiture s'arrête devant eux. avec son pote, là, toujours par terre. c'est le taxi. elle sourit, la fenêtre du gars s'ouvre. « j'me suis pas trompé d'endroit ? » qu'il demande. lo elle fait non de la tête, vigoureusement. par contre, là, je promet pas qu'elle se foute pas à poil dans le taxi, vu la tête du chauffeur. mignon. elle rattrape son pote par le col du t-shirt et ouvre la portière pour l'y foutre alors qu'il est toujours dans son trip chelou de rigoler tout seul. et en attendant qu'il rentre -seul, faut pas pousser- elle répond au petit-mignon-tomate. « bah tu sais quoi, t'as bien raison. fais pas comme moi -ou comme lui- à faire le-mot-en-c avec n'importe qui. après ça aura plus aucune importance, alors que pour l'instant, ça l'est encore important. » elle monte dans la voiture, et avant de fermer la portière. « j’espère que tu trouveras quelqu'un pour le-mot-en-c, parce que t'es gentil, petit-mignon-tomate. tu mérites quelqu'un de bien. d'ailleurs, merci, pour le taxi. » elle dit, en lui faisant un clin d'oeil très exagéré -mais involontairement, malgré elle- et en fermant la portière, des signes vigoureux pour lui dire au revoir. elle l'aimait définitivement bien, ce petit gars. dommage qu'elle ne se souviendra pas de lui, demain.

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