(Eneko) week-end en perspective

Son visage est caché et c’est frustrant de ne pas pouvoir l’observer lorsqu’elle lui dit toutes ces choses… Mais elles sont peut-être plus simples à dire dans cette position, alors il se contente de serrer ses bras autour d’elle, de caresser ses cheveux pendant qu’elle s’exprime. Le mauvais rôle, la méchante, ce sont des termes qu’il n’avait pas à l’esprit, parce qu’à ses yeux, ce n’est pas elle qui l’a. Après tout, elle n’a rien fait, à part se laisser aller. A ses yeux, Maona ne le vole pas à sa femme, elle n’est pas venue le voir en l’aguichant, lui faisant du rentre-dedans, en se fichant royalement de qui il fréquente dans la vie. Ca s’est fait naturellement. Mao est, au contraire, celle qui réchauffe son cœur glacé. Il va pour lui répondre, mais elle l’en empêche, d’un geste, alors il referme ses lèvres entrouvertes, l’écoute attentivement, sans la couper, mais il aimerait. Il aimerait lui dire que leur mariage est voué à l’échec, qu’avec ou sans elle, ça ne change rien au fait que la séparation aura lieu, qu’ils se sont fait trop de mal pour pouvoir sauver quelque chose. Ils ont déjà sauvé quelques meubles : Eneko en veut à Anna, mais il ne la déteste pas. A voir si elle lui tiendra rigueur de leur séparation définitive, il n’en sait trop rien, mais c’est encore une autre chose... C’est secondaire. Il ne compte pas rester marié à elle, juste parce qu’elle s’accroche à eux. Ca fait bien longtemps qu’il a cessé de le faire, lui. « Vous souhaitez en terminer là ? » Qu’il demande, le cœur lourd. Est-ce qu’il comprend bien ? En lisant entre les lignes, ça voudrait-il dire que ce serait mieux, pour elle, que les choses se calment ? Que c’est une situation trop compliquée pour qu’elle s’y engouffre, finalement ? Est-elle en train de vouloir faire marche-arrière ? « Vous n’êtes pas faible. Vous êtes sensible. Cette situation vous touche, alors… c’est normal. » Il n’aime pas ce terme qu’il pense si souvent de lui. Faible. Il n’aime pas quand ce mot sort de sa bouche, encore moins qu’elle le pense, parce qu’elle est tout sauf ça. Elle est sensible, fragile et n’est pas du genre à cacher ce qu’elle ressent. Il suffit d’un regard, ou qu’elle baisse la tête, pour comprendre qu’il y a un truc qui ne va pas. Même si la conversation s’achève sur une note qui ne lui plait pas tellement, parce qu’il n’a pas eu l’occasion de la rassurer, il la suit, ne l’arrête pas lorsqu’elle marche près du lit. Eneko fait un détour vers le côté où il y a les morceaux de verre brisés, ramasse les plus gros et les jette dans la poubelle, avant de défaire son jeans et s’allonger près d’elle. Ca le peine tellement de la voir dans cet état. « J’en ai envie, Mao. » dit-il. C’est naturel, de prendre soin d’elle. On prend soin des gens qui comptent et elle compte, pour lui, bien plus qu’il ne le pense. Tous les gestes qu’il a envers elle, toute l’attention qu’il lui porte, c’est bien plus que ce qu’il donne habituellement. Eneko se mord les lèvres, hésitant, mais il ne la replonge pas dans la conversation, pose sa tête sur l’oreiller et se rapproche de sa stagiaire, passant son bras autour de sa taille, se collant à elle autant qu’il le peut. « Reposez-vous. La journée a été longue. » Il dépose un baiser, très furtif, sur le coin de ses lèvres, puis un autre sur son cou et la garde contre lui, afin de lui montrer qu’il est là, qu’il ne s’en va pas et surtout, afin de profiter d’elle, de peur qu’après ce week-end, elle décide de s’en aller, de mettre fin à leur histoire. Elle le pourrait. Eneko n’en a pas envie, mais elle peut le faire.