Marek | des retrouvailles inattendues

Une soirée. Des invités. De la boisson alcoolisée. Des petites choses à manger. Mais surtout une rencontre complètement imprévue et inattendue au plus haut point. Résumé complet de la future soirée de la jeune femme. Elle sort de la douche et s’apprête à enfiler sa tenue. Non pas une belle robe de soirée, non, mais un jean et un petit chemisier. Ce n’est pas son truc les tenues de soirée et tout ce qui s’en suit. Alors elle enfile ce qui la met la plus à l’aise possible. L’heure tourne. Elle prend sa veste, ses clés et se rend là où se passe sa soirée d’anniversaire. Elle appréhende. Parce que la soirée se déroule chez l’un des meilleurs amis de son ex Marek. Elle a peur de les revoir tous, après tout ce temps. Après sa séparation avec Marek, elle ne leur a plus donné signe de vie. Un choix qu’elle avait fait par rapport à lui. Mais elle a surtout peur qu’il soit présent ce soir. Elle ne sait absolument pas comment elle réagirait si elle se retrouvait face à lui. Mais soit, elle essaie de sortir cette peur de sa tête et avance petit à petit vers le lieu de rendez-vous. Elle a, à peine le temps de frapper à la porte que cette dernière s’ouvre déjà devant elle. Elle pénètre dans l’appartement et salue tout le monde, ou presque. Directement, on lui apporte un gobelet en plastique, rempli d’un liquide dont elle ignore encore le goût. Elle prend place dans le salon avec d’autres invités. Des personnes qu’elle n’a pas revues depuis sa séparation avec Marek. Elle sourit, elle rit. Elle est contente d’être là. Mais, cette peur qu’elle a au fond d’elle resurgit à la surface. Elle décide de se rendre à la cuisine, afin de trouver quelque chose à grignoter. Elle marche la tête baissée, sans même regarder qui pourrait se trouver dans la cuisine avant elle. Puis quand elle franchit le pas de la porte de la cuisine, elle s’arrête net, le souffle coupé, sans pouvoir prononcer un mot. Elle venait de lever les yeux. Et ces derniers se sont posés sur la raison de sa peur, l’origine de son appréhension. Il était là, adossé contre l’évier de la cuisine, un verre à la main, rigolant presque aux éclats avec l’un des invités. Marek.

« Nikka, tu me les pètes, range tes putains de fringues à la con ou j'y mets le feu » - vêtements roulés en boule négligemment jetés dans un coin de la chambre de sa cadette  qui feint de ne pas entendre les insultes qui fusent à profusion, elle doit certainement  encore être dans la salle de bain à admirer son reflet. Il y fout un coup de pied rageur, deux débardeurs vont se toler sur la lampe de chevet qui tangue avant de retrouver son équilibre. Il se penche, Marek, pour attraper le pantalon en jean qui gît piteusement sur le sol, non sans se faire la promesse de lui passer un savon de maître , quand il aura le temps. Ce soir, il a des projets et il est hors de question que les morveuses viennent dézinguer son humeur, aussi bordéliques soient-elles. Il sort de la chambre, en se passant une main sur le visage. Lasse, il se demande s'il ne ferait pas mieux d'annuler ses plans, qu'ils soient porteurs de promesses ou pas. Le grand brun croise Jana, la petite dernière, dans le couloir, qui le dépasse sans lui lancer un regard, elle tient dans ses mains son téléphone et glousse, ses  paupières se plissent, un comportement suspect qui ne plait guère au grand-frère qu'il est. Pas du tout, même.(…)« On a bien failli croire que tu t'étais encrouté au point de ne pas pointer ta sale tronche de slovaque » - lance un pote, une canette de bière à la main, accompagnant ses dires un brin racistes d'un rire gras. Fait suite à l’accolade virile une discussion sur le sport, superficielle au possible. Ce soir, l'accord est tacite, personne n'évoquera les sujets qui fâchent et qui font du quotidien un ennemi juré. Enfin, c'est sans compter les emmerdes qui viennent toujours à point nommé. « Fais attention » - siffle Marek dont le pull se retrouve maculé de Corona.(…)  « T'es pas mieux comme ça ? Ma parole, la sœur à Sylvain te bouffe du regard » - remarque graveleuse qui fait éclater de rire le grand brun,  Marek reconnaît que la petite sœur de Sylvain n'est surement pas la seule dans ce cas et si elle est bien mignonne, la petite se tient bien au délà des limites qu'il s'octroie et surtout, que son amitié avec le frère lui permet. Il est sur le point de prendre la défense de cette dernière lorsque ses yeux se posent sur une brunette, son sourire disparaît, laissant place à une expression indéchiffrable. Mâchoires contractées, il abandonne son verre pour avaler les mètres qui les sépare dans une démarche où l'hésitation n'a aucune place. Aucun préambule. « Qu'est-ce que tu fais ici ? » - le reproche exsude à travers les mots. Il décide d'assassiner toute politesse, l'occasion est trop tentante.

« Qu’est ce que tu fais ici ? » Lui lance Marek à la figure. Elle venait à peine de pénétrer dans la cuisine que déjà il l’avait assassiné du regard puis lancé cette question sur un ton lancinant. Il n’était pas content de la voir et c’était bien entendu réciproque. Si leur ami en commun lui avait dit, à Avalon, qu’il serait présent, elle aurait réfléchi à deux fois avant de mettre les pieds dans son appart. Mais imbécile comme elle peut l’être parfois, elle n’avait pas pensé à la probabilité qu’il soit également présent, sans même que cet ami ne l’ait prévenu. « La même chose que toi, visiblement. » Lui répond-elle sans le lâcher du regard. Il n’a pas changé, même au bout d’autant de temps. Elle se sentait troublée dès que son regard s’était posé sur lui puis quand il est venu droit sur elle, elle s’était rappelé les raisons de leur séparation. Longtemps, durant leur relation, elle avait accepté son côté brut et rude de son caractère. Elle en avait eu assez de ne pas avoir de preuves d’amour de sa part, et de son manque de démonstration envers elle. Tandis qu’elle, devait se contenter de lui rester sienne, sans broncher, sans s’en plaindre. Elle but une gorgée de breuvage que contenait son verre. L’alcool vint lui brûler les papilles ainsi que l’œsophage. Elle ne détournait pas le regard. Certes, elle l’avait quitté, mais au fond, elle l’avait aimé. Oh ça oui, elle l’avait aimé et elle avait même le sentiment de l’aimer toujours, à chaque fois qu’elle avait pu l’apercevoir. Mais faire le premier pas n’était pas envisageable pour la jeune femme. « Déçu de me voir ici, peut-être ? »

Son regard coule sur elle, Marek s'imprègne à nouveau d'un visage dont il croyait sincèrement avoir fait le deuil, bloqué en plein processus de colère, il n'a jamais réellement réussi à oublier tous les « pourquoi » , tous les « comment », toutes les fichues questions qui étaient venues malmener sa boîte crânienne. Quelqu'un aurait pu le prévenir, lui dire qu'Avalon allait débarquer. Il est évident qu'il ne se serait même pas donné la peine d'annuler quelques plans pour venir dans ce coin et  tomber nez à nez avec un souvenir du passé, si tout lui semblait révolu, il se rend compte , à la toiser du regard, que rien ne change complètement. Rien n'est fini. Il jette un œil à sa bande de potes, en retrait. Des mirettes qui se tournent dans d'autres directions, refusant de croiser le feu de son regard. Marek aimerait feindre l'indifférence mais c'est Avalon. Élément déclencheur, un maelstrom de sensations en aucun cas inédites, bien au contraire, vient saluer sa fiole tandis qu'il croise les bras sur son torse, dans une posture austère. Du chiqué, il se retient ,comme la fois où elle s'est tirée, de lui lancer tous les reproches qu'il a stocké. Des kilomètres de rangées. Des milliers de reproches qui  prennent alors forme sur sa langue, qu'il mord presque jusqu'au sang. Parce qu'il a envisagé, de nombreuses fois, de composer son numéro, d'exprimer ce qu'il avait sur le cœur. Il l'envisage, à l'instant, agripper son bras, la trainer jusqu'au balcon et déverser le flot de paroles sans craindre d'être pris pour un gros con. Comme pour les reproches, le cœur couard, préfère la facilité des mots couteaux, leur tranchant. « Déçu ? Pour être déçu, il faudrait que j'y tienne, que j'en ai quoique ce soit à foutre. C'est l'impression que je te donne ? » - un sourire vient appuyer ses paroles, insolence se déploie. Hélas, c'est exactement l'impression qu'il donne, en démarrant au quart de tour. Il soupire. N'empêche, elle est toujours aussi bandante, les pensées graveleuses fusent et il secoue la tête, de manière bien inutile, il ne peut pas les chasser. «En tout cas, ils se sont bien foutus de nos gueules » - lance-t-il, un demi ton au dessus, pour que les espions postés plus loin entendent ce qu'il a à dire. .

Elle aurait eu envie de prendre ses jambes à son cou à cet instant. Mais l’affronter était peut-être ce qu’il y avait de mieux à faire afin de mettre un point final à tout ça. Même si la jeune femme n’en avait pas vraiment envie, même si longtemps elle avait eu envie de l’appeler. Elle était faible en amour. Elle était faible face à Marek et à son regard ténébreux. Face à son côté mystérieux et renfermé. Elle manquait d’air subitement. Certes, elle avait eu le courage de le quitter sans même le prévenir. Mais là, maintenant, elle était comme mise au pied du mur. Elle était certaine que les règlements de comptes allaient commencer ce soir, malgré qu’ils soient là pour leur ami. Elle s’attend à ce qu’il soit piquant avec elle, voire abject. Mais non, il était là, face à elle, tentant l’ignorance de ce qu’il a pu ressentir pour elle. Et idem pour Avalon. Elle tente de se convaincre qu’elle ne l’a jamais aimé, alors qu’à peine avait-elle posé ses yeux sur lui, que son cœur avait raté un rebond. Elle ne fut pas vraiment surprise par la réponse du jeune homme. « Il faut dire que je n’ai pas vraiment été habitué à ce que tu montres quoi que ce soit à mon égard. » Son visage reste fermé et elle compte bien contrer son insolence, malgré qu’elle sache qu’à ce petit jeu, il est le plus fort. Elle regarde autour d’elle et son regard se pose sur les personnes qui se trouvent dans la cuisine, les personnes avec qui se trouvaient Marek avant qu’elle ne dérange leur soirée privée dans la cuisine. « Ils savaient très bien que s’ils nous prévenaient qu’on serait là tous les deux, on n’aurait certainement pas mis les pieds ici. » Elle n’avait plus peur de lui, de ses paroles blessantes, de ses regards froids. Elle ne voulait pas avouer qu’elle était contente de le revoir, au plus profond d’elle-même

Les répliques boomerang qui reviennent immanquablement en pleine fiole, ouatées. Marek serre les dents, fait barrière comme il le peut à l'amertume qui vient flatter ses papilles. Non, il n'a jamais été démonstratif, il n'a d'ailleurs jamais réellement cru à l'importance du câlin dans le développement d'un individu. Les embrassades prolongées, les démonstrations mièvres, il n'a jamais signé pour ça et, elle le savait, Avalon. Il aurait dû lui suffire, comme il l'était à l'époque et tel qu'il l'est encore, à présent. Son regard suit le sien, allant se poser durement sur leurs  « amis » communs. Il les lui a présenté et le voilà maintenant à devoir les partager avec elle. S'il est généreux, partageur, ce type de partage là l'énerve profondément. Il n'en serait pas là, à caresser l'idée de se tirer si, elle n'avait pas insisté pour qu'il lui présente ses potes et si, ses potes et elle ne s'étaient pas aussi bien entendu. Les revers, il les essuie. « Peut-être que ça devrait se jouer à qui était là avant » - souffle-t-il, il s'agit d'avantage d'un constat que d'une interrogation. S'il aimerait que la conversation soit plus naturelle, il sait pertinemment qu'elle risquerait, conversation, de se finir en phrasés mielleux, passionnés. Ou en massacre, en fiasco sans nom. Le chaos lui fait la sérénade, Marek résiste pourtant à son rentre dedans. Putain, Avalon. « Je leur reconnais un certain culot » - et c'est certainement ce culot là qu'il apprécie chez ces macaques. « J'imagine qu'ils ont voulu forcé le destin » - et en la fixant du regard, elle pourrait y lire la question suivante : ou c'est nous qui l'avons forcé ? « Je crois qu'on a beaucoup de choses à se dire » - lance-t-il, pivotant pour s'éloigner de là : «viens, on s'éloigne de ces salauds ». En quittant la pièce, il lève le majeur bien en vue qu'il témoigne à ces intrigants son affection cordiale.

Elle ne voulait plus partir de cette soirée. Elle n’avait pas envie de céder sa place pour la laisser à Marek. Ils avaient été invités tous les deux et c’était leurs amis en commun qui avaient décidé à leur place de leur nouvelle rencontre. Après un an sans se donner signe de vie. L’un comme pour l’autre. Enième fut les fois où Avalon avait eu envie de l’appeler et de lui demander pardon pour son départ. Mais elle le connaissait presque si bien qu’elle avait su d’avance qu’il aurait refusé. Lui rejetant la faute de l’échec de leur couple. Certes, dès le début, elle connaissait sa façon de faire, sa façon d’être. Et cela l’avait convenu. Jusqu’au jour où elle fut en manque de tendresse de la part du jeune homme. Elle ne lui demandait pas la lune mais, pourtant, elle savait depuis le début de leur histoire qu’il ne serait jamais comme elle voudrait qu’il soit. Elle savait depuis le début qu’il ne serait jamais tendre avec elle, qu’il ne lui prendrait jamais la main lorsqu’ils se baladaient en ville ou qu’il ne la prendrait tout simplement jamais dans ses bras, juste par envie. Non, Marek, il était tout le contraire. Et lorsqu’Avalon lui parlait de son manque d’affection, il lui répétait qu’elle connaissait les conditions. Et que surtout, elle les avait acceptés. Alors voilà pourquoi elle était partie sans rien dire, sans s’expliquer avec lui. « On devrait être capable de se supporter, quand même. Le temps d’une soirée. Ça ne devrait pas être trop dur. » Certes, ils ne s’étaient pas parlé depuis un an. Mais Avalon devrait supporter l’idée que Marek se trouve dans la même pièce qu’elle. Elle ne connaissait pas aussi bien les amis de Marek que lui. Et elle reconnaissait que Marek avait raison sur ce coup-là. Elle se contenta d’un lever d’épaule et d’un lever des yeux au ciel. « Et bien ils ont réussi leur coup. » dit-elle sur un ton légèrement haussé pour que la bande de potes de Marek puisse l’entendre. Elle ne leur en voulait pas loin de là, mais elle aurait aimé être prévenu afin de se préparer à cette rencontre, bien qu’elle aurait décidé de ne pas venir au final. Il avait raison lorsqu’il avoua qu’ils avaient beaucoup de choses à se dire tous les deux. Alors elle s’éloigna de la cuisine lorsqu’il lui demanda de s’éloigner d’eux. Elle prit le chemin du balcon, histoire de prendre l’air. Elle s’appuya alors contre la rambarde et croisa les bras. Elle fit face à Marek. « Tu as beaucoup de choses à me dire ? Alors laisse-moi te dire que je suis surprise. »