(Marek) unless

Aïe, Aïe, Aïe, quand elle secoue la tête, c'est le monde qui se renverse, le monde qui tombe en pâmoison. Marek, il n'arrive pas à se débarrasser de l'image létale de la chair mise à nue, collée à sa rétine et qui demeure, même lorsqu'il ferme les paupières. Image incrustée. S'il n'est pas doté d'une vision à rayons X, il a l'impression de voir à travers ces couches de vêtements superflues. Concentration invoquée, il semblerait qu'il n'ait pas un gramme de volonté dans le domaine. Image est là et il s'y habitue petit à petit, nouveauté à laquelle il s'apprêtait à résister. Le grand brun ajuste sa position, ne quittant pas Ariane du regard, sourire squattant toujours ses lèvres. Il ne sait pas exactement quand est-ce qu'il s'est mis à la couver de ce regard  là , quel a été l'élément déclencheur et n'est peut-être pas encore prêt à mettre des mots sur la gêne qu'il éprouve constamment lorsqu'il se plante à ses côtés, ni à l'inverse, le contentement élémentaire qui l'étreint. Il hausse les épaules, amusé par cette attitude qu'elle adopte, dans une caricature de pétasse protégeant ses plats de bande. Le sourire s'élargit et le sang boue tellement. Il a envie d'attraper le gobelet dont elle vient de boire une gorgée et y boire, aussi. Il se demande si elle remarque l'effet de ce qu'elle vient de dire ? Si elle a la moindre idée du pouvoir de ce genre de mots, sortant de cette bouche là. Il pose les yeux sur ses lèvres, imperceptiblement. Puis, les relève sur elle. Bordel à cul. « Je crois qu'en effet, tu n'tiens pas trop l'alcool » - s'il en rit, se sont tous ses muscles qui se tendent, dans sa direction. Dans d'autres circonstances : un autre lieu, d'autres protagonistes, une poule quelconque  lui ayant balancé ça, il aurait réagi de manière moins sceptique, moins raisonnable. Il n'aurait pas perdu son temps, ni le sien, il aurait fait le nécessaire. Mais, c'est Ariane, merde. « Tu te rends compte de ce que tu viens de dire? » interroge-t-il, la mine grave. Parce que lui, totalement, son corps a compris un message et son cerveau semble être raccord.

tu ne sais plus ce que tu cherches, ce que tu veux, tu te perds, petit à petit entre son regard, ses lèvres et ton verre qui te fait déjà tourner la tête. c'est pas nouveau, tu n'as jamais tenu l'alcool, non jamais. ça te fait un effet de fou, même au bout de trois bières, tu es totalement pompette et tu ne sais plus vraiment ce que tu fais, ce que tu dis. c'est grave. « Je crois qu'en effet, tu n'tiens pas trop l'alcool » qu'il te confirme, c'est vrai que Marek, normalement, tu le vois seulement en journée, tu ne passes pas tes soirées avec lui, parce qu'il a ses amis, parce que tu es plus jeune, certainement, quelque chose comme ça alors non, il ne sait pas quels dégâts tu peux faire quand t'es totalement bourrée. tu hausses les épaules quand il te dit ça en souriant, tu n'as rien d'autre à dire finalement. « Tu te rends compte de ce que tu viens de dire? » qu'il te demande, finalement, le ton sérieux, tu le regardes, droit dans les yeux en levant la tête. tu sembles si petite par rapport à lui, avec son tas de muscles, sa carrure à en faire peur. t'aimerais bien, voir ce que ça donne d'être dans ses bras, de sentir la puissance de son corps, tu te perds, immédiatement dans tes pensées alors que sa question te revient. « que ... quoi ? non, qu'est-ce que j'ai fait ? » que tu demandes doucement, en buvant ton verre d'une traite, ça va te monter à la tête, bien rapidement, trop rapidement, tu le sais, mais c'est pas un problème, actuellement, tu fais un pas en avant, vers Marek, tu trembles, doucement, tu chutes, presque, tu te rattrapes sur son avant-bras que tu serres entre tes doigts. « oups » tu souris, doucement. « t'as raison, je bois beaucoup trop. » tu lui donnes raison, sans revenir sur le fait qu'il t'appartient, dans ta tête, il est à toi, uniquement. maintenant que t'y penses. « mais oui, t'es à moi Marek .. » que tu reprends, en toute innocence. « je crois que c'est parce que je n'ai pas mangé aussi. » que tu développes, tes paroles n'ont pas énormément de sens, mais tu continues, dans ta lancée, tout en te resservant un verre.

Quelle bonne excuse, l'alcool. A chaque dérapage, à chaque faux pas, c'est l'alcool. Personne ne se mouille, personne ne se blâme, personne n'endosse la responsabilité. La facilité, tout le monde court après, sauf un Novak. Et le Marek, il se passe une main sur le visage, il croit effacer les traits sidérés. Il croit les remplacer par d'autres, plus détendus. Des traits qui n'exprimeraient rien d'autre que le plus grand désintérêt. Avant, il en était capable. Surtout avec Ariane. Il était complètement désintéressé. Il ne se prenait jamais la tête à décoder la moindre de ses syllabes parce qu'il considérait qu'elle était jeune, qu'elle ne méritait pas ce genre d'attention. Avant, c'est comme s'il ne la voyait pas. Ou en tout cas, Ariane, c'était cette nana garçon manqué sur les bords qui lançait des blagues, extravagante, qui se jetait sur lui et il en riait. Consterné, il déglutit, une moue sur le visage. Pourtant, ça coince, ça coince quelque part et ne pas savoir où, l'enrage. Où est la tige qu'il l'extrait, merde. Qu'il s'en débarrasse. Parce qu'il ne sait plus à quel saint se vouer, ni quelle attitude adopter. Notamment lorsqu'elle se répète avec sa conviction fraiche, elle lui dit « t'es à moi » et à cet instant plus qu'à un autre, il a envie de lui donner raison. Il a envie, d'ailleurs, l'envie lui déchire les muscles et lui broie les os, elle est violente. Ses paupières se ferment, il accuse le contact de sa paume chaude sur son avant bras. Le geste est simple, les sensations ressenties, elles, à la limite de l'obscène. « J'ai raison » - il a toujours raison, il a toujours le don de se foutre dans des situations inextricables mais cette situation là, il aimerait se raconter des « pourquoi pas », se bercer de ce genre d'illusions. Mais, sans grande surprise, c'est l'alcool, le fautif, lui qui délie les langues et réchauffe les tempéraments pour donner des moments de grande solitude. « Je pense qu'on va s'arrêter là, Ariane » - lance-t-il, attrapant le verre qu'elle s'est servie, il le repose dès lors, décidant d'éloigner l'éponge guillerette aussi loin de la tentation que possible. Il glisse sa main vers la sienne dont il s'empare pour rejoindre le point où ils étaient situés plus tôt, uniquement pour se saisir de sa veste au passage. Il ne s'y attarde pas, il emprunte le chemin par lequel ils sont venus, Ariane dans son sillage. « Tu as besoin d'air » - la vérité, c'est qu'il en a besoin tout autant qu'elle. L'endroit l'étouffe et les regards, davantage. Ils descendent et après avoir traversé les couloirs, ils mettent enfin le nez dehors. « Tiens, mets ça » - il lui tend sa veste, dehors il ne fait pas si froid. Il lui file sa veste, simplement, il ne la demande pas en mariage et n'est pas sur le point de soigner un bobo. Ceci n'a rien d'un geste , rien d'une technique. Rien qui ne puisse être mal interprété. « Si je comprends bien, je suis à toi, ce qui signifie que tu es à moi aussi » - l'humour est drapé d'une pointe d'appréhension. Si elle te répond oui, lui souffle une petite voix.

« J'ai raison » qu'il te lance et tu pouffes doucement de rire. tu ne sais pas si tu dois lui dire que tu comprends, que tu l'avoues. tu ne sais pas si tu dois acquiescer ou lui demander comment vont ses chevilles. t'hésites et au final, tu gardes simplement le silence, un étrange silence pour te concentrer sur ton verre que tu essaies de remplir. « Je pense qu'on va s'arrêter là, Ariane » qu'il dit alors, il s'approche et s'empare de ton verre. « mais ! » et tu vois ton verre disparaître, se poser sur la table et il t'emmène avec lui. il accapare ta main, tu trembles, tu frisonnes doucement, pourtant l'alcool ça donne chaud, pas froid. alors, est-ce que tu frissonnes parce que tu as froid ? non, certainement pas, c'est certainement son contact, mais tu fermes les yeux toi, tu ne peux pas te l'avouer. « Tu as besoin d'air » qu'il te lance, comme s'il savait ce à quoi tu pensais .. non, il ne peut pas savoir, parce que toi tu vois Marek, devant, toi, Marek, te bloquant contre un mur, Marek et ses lèvres contre ta peau. non, il ne peut pas voir ça, il ne peut pas lire tout ça. finalement, vous arrivez rapidement dehors, sans que tu t'en rendes vraiment compte. tu as une légère brise qui vient se perdre sur ton visage. « Tiens, mets ça » il te tend sa veste tu la regardes, tu la prends mais tu ne la mets pas non, tu restes là, la veste entre les mains et tu souris, doucement en regardant Marek. et maintenant ? « Si je comprends bien, je suis à toi, ce qui signifie que tu es à moi aussi » qu'il demande, sur le ton de l'humour, ou quelque chose de ce genre, tu le regardes droit dans les yeux, t'oses même faire un pas vers lui, peut-être un de trop alors que tu t'approches un peu plus. « si la réciprocité fonctionne, oui, certainement, mais je peux me contenter du " tu es à moi ". » que tu lui lances sereine, tu joues, peut-être un peu trop, peut-être que l'alcool t'aide un peu, t'en sais rein, tu parles, tu ne t'arrêtes pas. « mais sinon oui, je suis à toi » que tu répètes, un léger sourire sur les lèvres, un sourire aguicheur cette fois alors que tu t'approches une nouvelle fois, tout en le fixant droit dans les yeux. tu joues le feu, c'est vrai, mais c'est trop tard maintenant, tu veux être à lui. « ça te gêne ? tu veux peut-être qu'on revoit le contrat ? » aguicheuse, encore, tu te transformes, doucement. c'est parce que c'est Marek, Marek. il tourne dans ton esprit, sans que tu t'en rendes compte, puis c'est tout ton corps qui le réclame. toi, totalement en manque d'attention, totalement en manque de relations humaines, c'est tout ce que tu réclames, là. Marek.

Le « oui » Marek part à sa recherche, le souffle court. Tigre en embuscade planqué derrière le voile de ses paupières, il observe sa proie, conscient de tous les phénomènes ayant lieu à l'intérieur de son organisme mais conscient surtout d'Ariane debout, devant lui. Elle a l'air détendu, elle a l'air si naturel, Novak , lui, a l'impression que tous ses tendons, tous ses ligaments, tous ses muscles jouent contre lui. Il guette l'affirmative et -tressautement- il finit par l'obtenir, noyée dans un discours, Ariane l'embrouille, il fronce les sourcils en essayant d'y trouver un quelconque sens. Une quête dont il revient bredouille mais, en vérité, ce qui lui semble substantiel à ce moment précis, c'est l’écho des mots qui se dilate dans ses tympans, sous le tempo imposé par le sang qui y bat. Pompe, pompe la mesure est à quatre foutus temps. Pas un, pas deux, quatre. Et il les sent, ces temps, jusque dans son entrejambe. Il ferme les yeux de vulgaires secondes où il se répète qu'il faut être raisonnable, qu'il doit garder son calme, qu'elle est pompette, qu'il n'est pas là pour tirer profit d'une conjecture biaisée. Qu'elle l'aguiche parce qu'elle n'a pas idée de tout ce qu'elle dit, même si elle prétend le contraire. Il se hait l'espace d'une nanoseconde de se montrer si pondéré, si la prudence est mère de toutes les vertus, il se voit l'envoyer chier. Davantage alors qu'elle se rapproche, projetant toute sa chaleur sur lui et son parfum. Elle sent le savon et le shampoing. Marek se tient au bord du gouffre, il serre le poing gauche tandis que son autre main se lève, spontanée, reste en suspens à quelques centimètres d'Ariane. Il ne quitte pas son regard, même lorsqu'elle y lance l'assaut avec ses yeux de chat. Même lorsqu'il s'y paume légèrement. Même lorsqu'il en revient à son « pourquoi pas ». Volonté s'effrite dangereusement. Putain de queue. C'est Ariane, pense-t-il, enfin. C'est Ariane Tellier. Ariane, c'est que Ariane. C'est que. Il dérape, regard, à nouveau sur ses lèvres et. Craque. Il souffle à peine un « Advienne qu'pourra » déjà sa bouche réclame la sienne, collision de chair, de lèvre dans laquelle il mord, plantureusement. Marek l'attire à lui, rien dans ses gestes n'est doux. L'avidité s'exprime, il l'emporte, se colle à elle, ses mains lambines serpentent le long de son échine hésitent sur le bas de ses reins, il s'impose à elle. L'hésitation n'est que passagère, il agrippe son fessier, émet une telle pression dessus, suffisante pour qu'elle écarte ses jambes, instinctivement. Argh. Il la soulève, la tenant fermement. S'il est dans de beaux draps, il préfère de loin être dans les siens, à l'instant. Alors, il approfondit , il se perd, il se casse plus la tête.

« Advienne qu'pourra » qu'il te lance en s'approchant de toi finalement. il t'attire, t'agrippe, t'enserre. ses lèvres se plaquent sur les tiennes, violence. tourbillon de sensations, de sentiments, de ressentis. tu te laisses transportée sans rechigner, c'est tout ce que tu demandais, tout ce que tu attendais, tout ce que tu voulais. ses mains partent à la découverte de ton dos, ton corps, ton fessier. légèrement pression, tu réponds présente et déjà tu te sens monter vers d'autres horizons. il te soulève, tu quittes terre, t'encercles tes jambes autour de sa taille, tu l'emprisonnes, de même que tes bras viennent entourer son cou. tes mains se perdent dans sa chevelure, instantanément. tu ne prends plus le temps de respirer, non, tes gestes sont rapides, insensés, complètement fou. tu t'agrippes inlassablement, tu ne veux pas qu'il te lâche, non jamais. tu te fiches de tout, il pourrait y avoir une météorite que tu ne la verrais même pas. tu en veux pas t'arrêter non, tu ne peux pas t'arrêter, ça jamais. t'es prise d'émotion, t'aimes le contact, t'aimes trop son contact, ses mains qui se plaquent contre ta peau. tu te perds dans ses sensations qui s'infiltrent en toi comme cette drogue douce. t'en veux encore, t'en demandes encore; petite tigresse en assoiffée, tu perds tes lèvres contre sa mâchoire, contre son cou. là, contre lui là, dans ses bras, tu te sens invincible, comme si rien ne pouvait t'arrêter. t'as entièrement confiance en ses gestes, t'as entièrement confiance en lui. Marek, tu le connais depuis si longtemps, pourtant tu te sens pas mal à l'aise non, tu t'es transformée en une petite guerrière farouche, avide de ses lèvres, de sa peau. tu soupires, d'aisance, tu soupires, tu laisses échapper quelques soupires alors que tu découvres cette partie de lui-même que tu ne connaissais pas mais dont tu avais parfaitement envie de connaître les moindres recoins. tu le veux lui et pas un autre en cet instant. tu t'en fiches que ce soit que pour ce soir. advienne que pourra comme il l'a si bien dit. « Marek .. » tu laisses échapper dans un souffle. tu retrouves ses lèvres, sans lui laisser le choix. tu les agrippes, les mordilles, c'est peut-être brusque, peut-être brutal, mais tu n'as jamais été de celles qui sont douces, non jamais. tu es farouche, tu te perd dans ses gestes sans retenue, non aucune.

Elle a cette manière de prononcer son prénom, Ma-rek, il claque comme un coup de fouet dans l'air, ce sont ses poumons qui en manquent et son corps, entier, ravagé qui y répond. Il sourit, contre ses lèvres, toutes ses fibres sont mises sous tension et il sent, son essence prendre de l'ampleur à tel point qu'il y ressent une douleur particulière. Sa main gauche maintient sa prise, biceps bandé, il dégage sa main droite qui s'en va flatter la peau, louvoyant diablement sous le haut de la belle. Il s'en tape pas mal d'être dehors, exposé. Il n'a conscience que de ses jambes enroulées autour de sa taille, appuyant salement et la proximité de ces monts et merveilles qu'il a hâte de visiter comme le plus fervent pèlerin. Sa paume est rapeuse contre son grain de peau, il a l'impression qu'elle possède la douceur de la soie. Il se demande même comment est-ce qu'il a pu tenir aussi longtemps ? Comment , jusque là, il n'a pas embrassé cette bouche et ce cou et le reste pour lequel il nourrit d'insolites projets ? Main remonte, à la recherche de ce bout d'chair aperçu tantôt, le fantasme devient réel. Soupire se perd, étouffé par le baiser qu'elle dépose sur ses lèvres à cet instant. Le grand brun dévore et laisse sa langue goûter au suçoir. Il se jette dans le vide. « Prenez-vous une chambre » - sursaut, il se raidit. Rappel âpre, il se décolle d'elle, pris sur le fait. A bout de souffle mais certainement pas au bout de ses intentions lascives, il secoue la tête, éclate d'un rire qui dérape en grognements. La frustration se déverse et coule jusqu'à l’élément indésirable, sous la forme d'un regard noir. Une connasse qu'il reconnaît comme une joueuse de l'équipe d'Ariane. Il baisse la tête quelques instants, ferme les paupières pour faire le tri dans ses pensées libidineuses. Un, deux. Un, deux. Bon sang, il est bien trop en rogne pour répliquer quoi que ce soit de diplomatique , il se contente simplement de relever le regard vers la nouvelle venue qui tape l'incruste , une cigarette en main, dans une posture décontractée. Elle qui vient de bousiller ses plans. Il a chaud et peut même être déclaré incapable de formuler une phrase censée. Trop d'envie se distille dans ses veines, pire, c'est une faim qui terrasse et lui pulvérise les entrailles. Et merde, qu'elle se tire cette grognasse qu'il puisse niquer tranquille – songe-t-il, un rictus mordant ses joues. Novak n'aime pas la situation ni ce qu'il s'apprête à faire : déclarer forfait. C'est peut-être mieux comme ça. Pourtant, il sait désormais que tout est foutu. Que leur relation ne sera probablement jamais la même. Certains se lancent des « foutu pour foutu » pour se dédouaner des décisions mal prises. Novak esquive. Il se penche vers Ariane. « Oublie ce que j'ai dit plus tôt, je suis sûr que ta copine ici présente sera ravie de te raccompagner » - goujat. « Puis, tant qu'on y est, oublie tout ça » - elle a dix neuf ans se souvient-il dépité, effectivement, il a déconné. «J'y vais » - irrésolu, il finit par esquisser deux pas pour lui claquer un baiser sur sa tempe. Résistant au désir de l'entrainer avec lui.

t'as juste l'impression qu'il ne te lâchera pas, qu'il ne te lâchera jamais non, t'as juste l'impression qu'il va t'emmener avec lui, loin, loin de tout et qu'il va te faire gravir des montagnes. contre lui, t'es juste invincible, avec lui, t'es juste adepte de bien de choses. vos lèvres ne cessent de se croiser, encore et encore, de se perdre l'une contre l'autre jusqu'à ce que tout dérape. jusqu'à ce que cette meuf sorte, jusqu'à ce qu'elle débarque et qu'elle reste plantée là. grognement, râle, il te descend comme si tu avais perdu tout intérêt. tu t'attends pas à ça, tellement pas. c'est ton coeur qui saigne et ton corps qui se frustre. « Oublie ce que j'ai dit plus tôt, je suis sûr que ta copine ici présente sera ravie de te raccompagner. Puis, tant qu'on y est, oublie tout ça » coup de poignard, t'as envie de lui sauter au cou, t'as envie de lui hurler dessus, t'as juste envie qu'il reste ou qu'il t'emmène avec lui. comment ? comment peut-il faire ça,comment peut-être changer du tout au tout ? comment peut-être s'enfuir avec ce sourire aux lèvres alors que tu te retrouves là, frustrée comme pas possible. oublier ? et puis quoi encore ? c'est impossible d'oublier, il devrait pourtant le savoir, s'en rendre compte que c'est trop tard maintenant, qu'il ne peut décemment pas te demander une telle chose. «J'y vais » un pauvre baiser sur ta tempe et il se casse. t'as envie de lui crier que c'est un connard, qu'il peut marcher plus vite, qu'il peut se casser, que ça te fait rien, absolument rien. mais ce n'est pas vrai, ça te fait du mal, trop de mal pour que t'arrive à bouger. l'autre te regarde comme une conne et tu lui lève ton majeur en l'air. tu le vois qui s'en va et tu ne réfléchis pas tu te mets à courir dans sa direction. tu refuses, c'est hors de question, tant pis pour ton égo, tant pis, qu'il te rejette une seconde fois, puis une troisième fois encore. tant pis, t'es prêtes à courir ce putain de risque. « Novak ! » que tu lui cries tout en arrivant à la vitesse de la lumière. tes jambes ont compris, elles ont réagit au quart de tout et c'est maintenant Ariane la fusée qui est de retour. tu te postes devant lui. il te surplombes, largement. ça ne t'impressionne pas, t'es prêtes à en découdre. « t'es sérieux là ? » que tu reprends alors, tentant de paraître sûre de toi. tu le fixes, droit dans les yeux, tu fixes ses pupilles, tu ne le laisseras pas partir mais n'es-tu pas en train de te ridiculiser par hasard ? « t'as oublié ta veste » que tu finis par murmurer en l'enlevant et en lui tendant.

Novak entame sa route, prenant la direction opposée à celle où il vient de larguer Ariane, persuadé qu'il s'agit là de la meilleure décision qu'il ait pu prendre la concernant. S'il se sent encore chamboulé par ce qui vient de se produire, il accueille la fraicheur avec satisfaction. Il en a besoin, spécifiquement. Mais peut-être que ce n'est pas la seule chose qui lui paraisse substantielle à l'heure qu'il est. S'il se félicite d'avoir fait preuve de discernement ( est-ce que s'en est, sérieux?), il ne peut jouer contre la pointe de regret enfoncée dans un coin d'son torse où il n'est pas bon de vouloir jeter un coup d’œil. Absorbé dans ses réflexions, il entend à peine les pas frapper le bitume à sa poursuite mais, bientôt, il est forcé de voir, forcé d'écouter Tellier qui lui barre le passage. Une habitude, ça aussi. Écartelé entre l'agacement et l'amusement, il observe une halte et hausse les épaules, le regard grave. Il aimerait qu'ils s'entretiennent de parrain à protégée, seulement, il sait qu'il n'est plus question de tous les beaux mots comme « professionnalisme », « platonique » ou cette drôle d'innocence dont il aimait décorer son discours. A l'eau, comme l'embarcation Simplicité, emportée par les flots nommé Complication, elle boit la tasse. Des cris, des mouvements brouillons, la rage au ventre et autre chose. Il ne bouge pas d'un centimètre, même ses traits restent de marbre lorsque tout, dedans, se montre assez friable. Il pourrait se comparer à de la taule mais il relève plus de l'argile. « J'ai pas l'air ? » - sifflement, entre les dents qui pointe, quelque part, le surréalisme de la situation est assez marquant. Marek n'est pas homme à mots, il aime peser ses paroles et il peut se révéler irritant, à la longue. Langue qui claque contre le palais, mâchoires qui se serrent, subrepticement. « Garde là » - insiste-t-il, d'ailleurs, non, il ne sait pas pourquoi il insiste. Il ne sait même pas pourquoi au lieu d'ignorer ses babillages, tailler la route comme il l'aurait fait, il reste là, à tamponner ses répliques comme un pantin. « et donne moi une excuse pour te revoir » s'entend-t-il articuler, après une intervention qui lui parait impénétrable. Ce n'est pas exactement ça qu'il aurait voulu dire, c'est certain. Clairement, ça ne tourne pas rond. Pas rond du tout sur la planète Novak. « Mais là, là j'ai juste besoin de prendre un peu de recul pour réfléchir à tout ça » - c'est vrai.

« J'ai pas l'air ? » si bien sûr, un peu trop même, beaucoup trop même mais tu ne réponds pas non, parce que son sérieux te fait trop mal, son sérieux te casse en deux. son sérieux, il t'atteint de trop alors tu ne réponds pas. « Garde là. et donne moi une excuse pour te revoir » qu'il continue finalement. parce qu'il a besoin d'une excuse pour te revoir maintenant ? t'as mal, t'as trop mal d'entendre ça. parce que t'as l'impression de l'avoir perdu Marek, sauf que tu peux pas vraiment avancer sans le Novak, c'est compliqué sans lui, alors t'oses pas vraiment. tu n'sais pas ce que tu dois faire exactement. tu gardes le silence, un silence pesant. « Mais là, là j'ai juste besoin de prendre un peu de recul pour réfléchir à tout ça » qu'il conclue, et tu hausses les épaules en serrant sa veste contre toi. t'es à deux doigts de lui rendre, de lui jeter à al gueule comme il t'a jeté. parce que s'il a besoin de ça pour te revoir, autant qu'il ne te revoit plus n'est-ce pas ? sauf que tu sais que si tu lui dis ça, tu n'auras plus aucune chance de le revoir. tu l'sais, il est coriace le Marek, il est têtu et toi, tu veux le revoir. « très bien .. ok .. appelle-moi alors. »
tu lui dis, parce que tu sais pas quoi lui dire. tu recules doucement, tu te recules, et tu finis par lui tourner le dos pour t'en aller. t'as pas envie de retourner au gymnase, à la fête ou quoi que ce soit. tu as tes clés, ton téléphone, alors tu vas juste rentrer chez toi. tant pis, tant pis pour tout ce que tu ressens là. t'es frustrée, t'es tellement frustrée que tu pourrais te jeter sur un sdf. façon de parler évidemment. tu t'en vas vers l'endroit où est rangé ton vélo, simplement comme ça, avec en tête ce baiser passionné qui te remue énormément. putain, t'avais envie de lui et il a tout gâché. il a tout gâché.