De bon souvenir. - Jolene

Il est dix-huit heures. Je suis assise sur ma chaise, à lorgner par la fenêtre en attendant l’arrivée de Marion. Nous ne nous sommes pas parlé depuis notre aventure qui est arrivée… sans que l’on ne contrôle tout. L’envie était là de mon côté, c’est certain ; je ne suis pas du tout opposée aux relations avec une personne du même sexe, l’alcool dans nos veines en a profité pour donner vie à mon désir, mais de son côté… Je ne suis pas sûre qu’elle est appréciée me voir au petit matin à ses côtés. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive, mais la différence, c’est que cette autre jeune femme ne m’a jamais recontacté par la suite. Notre amitié ne valait plus rien. La honte de son côté, quelque chose comme ça. Un instant, j’ai eu peur que ce soit la même chose pour Marion, mais son message m’a un peu rassuré. Un peu, parce qu’il m’a laissé comprendre qu’elle souhaitait discuter et peut-être bien que ça me fera déchanter, que mon espoir de la garder dans mon cercle sera ruiné. Alors oui, j’ai la frousse. Je me pince les lèvres, puis les libère en sentant des mains sur mes yeux et une voix, une que je connais, me faire sourire. Si ça, c’est une manière douce de couper les ponts, alors je ne comprends plus rien. Je pose mes mains sur les siennes et les retire, avant de me tourner vers mon amie et me lever pour la prendre dans mes bras. « Marion. » C’est un petit murmure de soulagement. « Je suis contente que tu sois là. » Je mets fin à notre étreinte et la regarde un peu avant de lui désigner la chaise en face de la mienne. « Non pas que j’ai pensé que tu ne viendrais pas… » Ca m’a effleuré l’esprit, c’est vrai. « Comment tu vas ? » Une question banale avant d’aborder le sujet qui peut fâcher : « J’ai cru que tu m’en voulais. » Je suis rassurée de constater que non. Enfin peut-être que si ?

Vu comme ça, ça peut sembler stupide et finalement, ça l’est… Je me suis faite du souci pour rien. A en voir son sourire, elle ne m’en veut pas le moins du monde. Sa distance se justifie bien mieux à présent que j’en sais plus sur son emploi du temps chargé : son boulot l’accapare, tout comme le mien. Je ne peux pas lui en vouloir pour ça, étant la première à repousser certains rendez-vous personnels, pour d’autres qui sont professionnels. Célibataire, mes amis comptent beaucoup pour m’épanouir, mais j’ai le temps et l’énergie pour me consacrer à ma profession. C’est une passion, bien que je sois parfois en doute. Je ne peux qu’être compréhensive vis-à-vis de sa situation. « Ca va aussi, tout autant débordée que toi, mais il est fort possible que je le sois moins d’ici quelques jours. » Mon client actuel ne veut pas de moi et j’aurais plus de temps. Ca ne m’enchante guère. « Mais toi, raconte-moi, ton nouveau boulot ? Comment ça se passe ? » J’ai tellement eu peu de nouvelles ces derniers temps, que je ressens le besoin d’en savoir davantage, qu’elle me mette au goût du jour. « Je m’en suis doutée quand tu as commencé à parler de ton nouveau travail, mais sur le moment, je te jure… Je pensais vraiment que tu m’en voulais. Les nouvelles expériences, comme ça… Ca peut faire fuir, ou gâcher une amitié. » Je suis contente que ça ne soit pas le cas, qu’elle me considère comme étant son amie, encore. Ca me rassure. Je lui adresse un sourire et prends sa main dans la mienne que je serre. « J’ai tellement eu peur. Je m’en suis voulu, tu sais, mais tant mieux si tu ne me tiens rigueur de rien. Tu veux quelque chose ? » En tout cas, elle semble… aller bien. Ne pas être perturbée. Ca aurait pu la retourner, mais non, au contraire, elle semble être la même qu’auparavant, avec moi.